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Chaque personnage dans un “uvre litt©raire se cr©e, se d©finit par des nombreux mani¨res

Date post: 11-Feb-2022
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MASARYKOVA UNIVERZITA FILOZOFICKÁ FAKULTA Ústav románských jazyků a literatur L'analyse des personnages dans le roman La jalousie d'Alain Robbe-Grillet Bakalářská práce Vypracovala: Vedoucí práce: Petra Slobodová prof. PhDr. Petr Kyloušek, CSc. Brno 2009
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Page 1: Chaque personnage dans un “uvre litt©raire se cr©e, se d©finit par des nombreux mani¨res

MASARYKOVA UNIVERZITA

FILOZOFICKÁ FAKULTA

Ústav románských jazyků a literatur

L'analyse des personnages dans le roman La jalousie

d'Alain Robbe-Grillet

Bakalářská práce

Vypracovala: Vedoucí práce:

Petra Slobodová prof. PhDr. Petr Kyloušek, CSc.

Brno 2009

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Prohlašuji, že jsem bakalářskou práci vypracovala samostatně s použitím uvedené

literatury.

Prohlašuji, že tisková verze práce přesně souhlasí s verzí elektronickou.

V Brně dne 29. dubna 2009 ...........................................................................................

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3

Chtěla bych poděkovat svému vedoucímu práce, prof. PhDr. Petru Kylouškovi, CSc., za

cenné rady a připomínky, za trpělivost a čas, který mi věnoval.

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TABLE DES MATIÈRES

1 INTRODUCTION ................................................................................................................................ 5

2 LE PERSONNAGE LITTERAIRE - SON EVOLUTION AU COURS DE L’HISTOIRE .......... 7

2.1 LES COMPOSANTS DU PERSONNAGE LITTERAIRE ............................................................................ 8 2.2 LE PERSONNAGE D’APRES LA THEORIE DES PERSONNAGES-HYPOTHESES ET PERSONNAGES-

DEFINITIONS ...............................................................................................................................................10

3 ALAIN ROBBE-GRILLET ...............................................................................................................12

3.1 LE ROMAN LA JALOUSIE ...................................................................................................................13

4 PERSONNAGES DANS LE ROMAN JALOUSIE D’ALAIN ROBBE-GRILLET.....................14

4.1 FRANCK .............................................................................................................................................14 4.1.1 LE NOM, LA DESCRIPTION PHYSIQUE ...............................................................................................15 4.1.2 LES VETEMENTS ..............................................................................................................................15

4.1.3 LE COMPORTEMENT DE FRANCK .....................................................................................................17

4.1.4 LE CARACTERE DE FRANCK .............................................................................................................18

4.1.5 CHRISTIANE .....................................................................................................................................20 4.1.6 FRANCK - PERSONNAGE-DEFINITION OU PERSONNAGE-HYPOTHESE ?............................................21 4.2 A... ......................................................................................................................................................24 4.2.1 LE NOM ET LE PHYSIQUE DE A... .....................................................................................................25 4.2.2 LE COMPORTEMENT DE A... ............................................................................................................28 4.2.3 LES RELATIONS DE A... AVEC LES AUTRES PERSONNAGES .............................................................30 4.2.4 LA PAROLE DE A... ..........................................................................................................................34 4.2.5 LE MILLE-PATTES ............................................................................................................................34 4.2.6 A... COMME UN PERSONNAGE-HYPOTHESE .....................................................................................36 4.3 LE NARRATEUR - LE MARI ................................................................................................................37 4.3.1 LE MARI SE PRONONCE DANS LE TEXTE ..........................................................................................38 4.4 LE PERSONNAGE DU NARRATEUR-MARI COMME UN PERSONNAGE-HYPOTHESE .........................42

5 LA COMPARAISON DES PERSONNAGES D’APRES LA THEORIE DE DANIELA

HODROVA ................................................................................................................................................43

6 CONCLUSION ...................................................................................................................................45

BIBLIOGRAPHIE ....................................................................................................................................46

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1 Introduction

Le personnage est une des unités principales du roman. C'est quelqu'un avec qui on

s'identifie, qui nous permet de pénétrer dans le roman. Par les personnages, on se reconnaît ou on

peut connaître les sentiments des autres personnes. Le personnage nous sert donc à vivre une

autre vie, à nous enrichir de nouvelles expériences, vécues seulement dans la fiction, ou pour

nous divertir tout simplement, pour suivre une vie différente du nôtre.

Alain Robbe-Grillet, le romancier français, a été un des écrivains, qui ont annoncé la mort

du roman classique. Il a été un des premiers, ou un des plus connus, qui n’hésitaient pas à faire

des pas décisifs dans l'abandon des règles classiques du roman, de se priver de ces unités de base

du roman, dont le personnage. Ses personnages ne sont pas des personnages classiques du tout, il

leur manque toujours quelque chose, surtout une caractérisation directe, d'après laquelle on

pourrait les imaginer, les fixer. Robbe-Grillet nous complique toujours notre lecture, il ne nous

donne pas assez d’informations, et même si nous cherchons et trouvons quelques qualités de nos

personnages, il nous reste toujours des taches blanches sur la carte de leur caractère et de leur

signification dans le roman.

Une théoricienne tchèque Daniela Hodrová a développé dans ses réflexions théoriques

des approches par lesquelles un personnage littéraire, et surtout un personnage littéraire

moderne, peut être vu. Une de ses divisions présentait deux pôles différents ou deux types

différents des personnages littéraires, à savoir le personnage-définition et le personnage-

hypothèse. Ils diffèrent surtout par le nombre des caractéristiques données et par la qualité de ces

caractéristiques et par l’image globale, qu'on obtient sur le personnage. De ce fait, nous avons

pensé, qu'il serait possible de comparer ce manque et l'extension de ce manque des

caractéristiques des personnages dans le roman La Jalousie d'Alain Robbe-Grillet, qui est une

des œuvres les plus connus de cet auteur, avec cette théorie du personnage-hypothèse et du

personnage-définition et en déduire quelques conclusions.

Nous allons donc analyser des différents aspects des personnages dans le roman La

jalousie, par lesquels ils sont présents dans le texte, tels que leur parole, leur apparence physique

et les autres traits descriptifs. Puis nous allons essayer de les interpréter du point de vue de la

théorie de personnage-hypothèse ou de personnage-définition, en essayant de les classer dans

une de ses catégories. Après, nous voudrions les comparer entre eux et déterminer un certain

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ordre, d'après le degré de leur caractère hypothétique, où ils se trouvent entre les deux extrêmes

du personnage-définition et personnage-hypothèse.

Le but de ce travail est donc d'analyser des personnages de ce roman qui sont au

premier coup d'œil des personnages-hypothèses, des personnages hypothétiques, mais qui

peuvent ne pas l’être, à tel point, du moins.

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2 Le personnage littéraire - son évolution au cours de

l’histoire

La conception du personnage littéraire évolue plus ou moins tout au cours de l’histoire de

la littérature. Pendant longtemps, elle se conformait à la conception anthropologique et

psychologique du personnage, le personnage littéraire a pris des traits des hommes et des

femmes pour devenir un « vrai » être humain, une partie d’un vrai monde, le plus réel possible. Il

est vrai que cette approche a été typique surtout pour le réalisme qui essayait de construire un

personnage plus fiable après tous les héros romantiques, dont la description a été en majorité trop

simple et standardisée. Ils ne pouvaient pas représenter que partiellement l’être humain, qui est

un ensemble beaucoup plus complexe dans son existence que ne sont de simples émotions ou

passions. Mais pour remonter à l’origine de la typologie et des personnages types, il faut aller

plus loin, dans le classicisme et même dans l’ère qui l’a inspiré le plus, l’antiquité. Ici le statut

social et l’appartenance à une certaine couche sociale, avec lesquels était liée une « manière

d’être », le comportement de tel homme ou de telle femme, représentaient une des qualités

principales du personnage littéraire : « […] le type est une variante de caractère, où est mise en

relief sa fonction sociale représentative, un personnage tant que type représente une certaine

époque, une certaine couche sociale.»1. Cette tendance a été affaiblie au début du 19

ème siècle,

où l’esthétique du réalisme revendiquait une fidélité plus grande au monde réel et aux personnes

réelles, en les voyant sous plusieurs aspects, leurs attribuant une gamme plus variée de qualités

personnelles ou de mouvements de l’âme, qui n’étaient pas tellement limités disons par l’esprit

de leur statut social et de ce qu’on attendait d’eux.

Le 20ième

siècle annonce l’arrivée du personnage, qui est un ensemble des composants

dynamiques, un fleuve, un processus qui est en cours : « […] nous le percevons dynamiquement

tout le temps, pas comme une chose, mais comme une continuité ou comme un événement. » 32

Le personnage perd ainsi son aspect perfectif, sa clarté, il n’a plus un noyau ferme, qui est déjà

accompli ou va s’accomplir dans l’histoire, il ne s’accomplit pas, et si oui, imparfaitement.

1 « […] je typ variantou charakteru, u něhož je zdůrazněna jeho sociálně reprezentativní funkce, postava jako typ

reprezentuje určitou dobu, určitou sociální skupinu [...] », (přel. aut.), Hodrová D. a kolektiv: ...na okraji chaosu...

Poetika literárního díla 20. století, Torst, Praha 2001, p. 533 2 « […] že hrdinu «neustále vnímáme dynamicky, nikoli jako věc, nýbrž jako svého druhu plynutí či událost […] »

(přel. aut.),Vygotskij Lev Semionovič: Psychologie umění, Praha 1981, cité de: Ibid., p. 232.

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2.1 Les composants du personnage littéraire

Mais concrétisons quelques données, sur la base desquelles on peut définir le personnage.

Le personnage peut être caractérisé implicitement ou explicitement. Explicitement, par le

narrateur, qui peut décrire le personnage lui-même et aussi laisser les héros se caractériser eux-

mêmes. Il peut faire parler un autre personnage de celui-ci, en donnant une image plus concrète

et en ajoutant des informations encore plus «actuelles», prises de la réalité de l’œuvre. Le

personnage est fait aussi par ses souvenirs, qui peuvent être révélés au cours de la narration, par

ses expériences, qu’il subit et qui le forment. Implicitement ou de la façon cachée, le personnage

suggère son caractère par diverses manières qui dénoncent son naturel. En fait tous ses actes

conscients ou inconscients le déterminent. Prenons en compte aussi le fait que le roman a déjà

une certaine histoire et une certaine norme, une forme «typique» pour le roman, qui reste dans

notre mémoire et que nous ressentons comme un standard. Ainsi tout écart de cette norme peut

changer et apporter quelque nouvel attribut à l’image du personnage.

Le personnage nous découvre son monde intérieur par ses pensées et ses sentiments dont

le narrateur peut être l’intermédiaire. Les cas où le narrateur ne se prononce pas, c’est par

exemple dans des dialogues, où le personnage entre en interaction avec un autre, où il n’est pas

ciblé sur lui-même mais parle d’un sujet, donc il exprime ses avis plutôt vis-à-vis de quelque

chose d’autre. Ici, sa personnalité se prononce par son discours, par le style de son discours, type

de langue qu’il utilise. Une catégorie spéciale de la parole est le langage du corps, « […] une

action non-verbale, qui a du sens surtout dans l’interaction et dans les situations, où on exprime

des sentiments […] »3

A part sa parole, le personnage littéraire est défini implicitement, indirectement, par son

comportement, ses émotions, qui nous permettent de déterminer en comparaison avec ses paroles

le type ou plutôt le caractère du personnage. La différence entre le type et le caractère n’est pas

très évidente et ces deux termes tendent à se confondre. Mais on peut dire, que le caractère est

plus complexe, il est doté « […] d’un plus grand nombre des qualités […] et l’accent est mis sur

la particularité et l’unicité d’un individu […] »4 Au contraire, le type représente « le

3 « […] nonverbální jednání, které má význam zlváště při interakci a tehdy, vyjadřujeme-li city [...] », (přel. aut.),

Ansgar Nünning, Lexikon teorie literatury a kultury, Host, Brno, 2006, p. 690 4 « […] u charakterů vybavených větším množstvím vlastností se důraz klade na osobitost a nezaměnitelnost jedince

[…] », (přel. aut.), ibid., p. 321

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rassemblement limité des qualités psychologiques ou sociologiques ».5 De nos jours, la tendance

des écrivains est de ne pas fournir une caractéristique directe, abstraite, de leurs personnages. Ils

préfèrent présenter directement les pensées et les sentiments par le monologue intérieur ou par le

style indirect libre, ou même ils évitent celui-ci en ne montrant que le comportement et les faits

du personnage, sans aucun commentaire.6

La partie importante du personnage est son nom. Il influence, particulièrement par son

caractère répétitif, les autres composants du texte. Soit par sa partie sonore ou par sa partie

thématique, il « […] participe à la construction d’un texte comme un tout ».7 Le 20

ième siècle voit

s’accentuer un rôle du nom dans les œuvres littéraires, ce qui peut être le « […] reflet d’un excès

de l’individualité et d’individualisme […] »8. L‘attitude envers le nom a été aussi déterminée par

l’orientation de la philosophie vers le langage et par la relation compliquée entre la langue et la

réalité, le nom étant parfois comme un dernier lien avec le réel.9 Tous les noms dans la littérature

sont motivés de quelque façon, il peut ne pas s’agir de noms, ce peuvent n’être que des

appellations, comme le maire, ou des noms incomplets, comme un prénom seul, ou des initiales.

Le nom peut aussi apporter une certaine caractéristique, décrire le personnage d’une façon plus

ou moins directe,10

soit aussi parodique ou moqueuse.

Le personnage parle, il réagit et il est de plus doté de quelque nom. Mais il a bien sûr une

certaine apparence et il est vêtu, ainsi il est possible de le visualiser, de l’imaginer. Mais la

littérature moderne tend à se priver du corps de son héros, le physique des personnages souvent

n’est pas décrit ou au contraire il est décrit trop minutieusement, avec un soin scientifique.

Tous ces procédés ou caractéristiques sont plus ou moins implicites. Si nous le décrivons

par la théorie des signes saussurienne, il s’agit d’un signifié, de ce que l’objet (ou le personnage)

est, ce qu’il représente, comment il « existe ». Le comportement et toutes les caractéristiques du

personnage, qui ne sont pas commentés, l’essentiel du personnage, c’est son signifié. Si l’auteur

commente le comportement ou les traits d’un personnage, s’il le décrit, il s’agit d’un signifiant.

5 « […] omezené spojení psychologických nebo sociologických znaků […] », (přel. aut.), ibid. 6 Hodrová D. a kolektiv: ...na okraji chaosu..., op.cit., p. 522 7 « […] podílí se na výstavbě textu jako celku […] », (přel. aut.), ibid., p. 599 8 « […] odrazem excesu individuality a individuálnosti […] », (přel. aut.), ibid., p. 600 9 Ibid. 10 Ibid., p. 602

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2.2 Le personnage d’après la théorie des personnages-hypothèses et

personnages-définitions

Les procédés de l’analyse et de la caractérisation du personnage définis ci-dessus, sont

des procédés plus ou moins généraux, des composants, qui forment une base de données. Ces

données peuvent être regroupées, définies et étudiées par de nombreuses façons. Il existe une

variété de théories, qui essaient d’analyser le personnage, de l’étudier et de l’expliquer d’une

façon pertinente, relevant et soulignant certains traits spécifiques en les interprétant de manière

peut-être nouvelle ou originale pour trouver ou mieux comprendre le sens de l’œuvre.

Une des théories ou des conceptions modernes du personnage est l’approche d’une

théoricienne et d’une femme de lettres tchèque Daniela Hodrová. Elle développe entre autres la

bipolarisation de la typologie des personnages entre le « le personnage-définition et le

personnage-hypothèse »11

. Le personnage est « […] un ensemble des informations, un

composant dynamique du texte […] il est aussi un signe, un signe dynamique ».12

Ce caractère

dynamique ne dépend pas de l’époque où le personnage a été créé, ce dynamisme est sa qualité

constante. 13

Comment s’exprime le caractère du personnage en tant que signe ? Son signifiant,

ce sont « […] toutes les données explicites sur son apparence, son comportement et ses actions,

sur son nom, sa parole […] »14

son signifié « […] peut-être incorporé explicitement

(l’appréciation que le narrateur porte sur le personnage ou la caractéristique abstraite), mais

plus souvent, surtout dans la prose du 20ième

siècle, il y est présent seulement comme le sens

potentiel que le lecteur essaie de trouver pour son interprétation […] ».15

Le signifié du

personnage-définition est décrit complètement dans le texte, c’est un personnage entièrement

explicable, déterminé16

, avec toutes les donnés nécessaires pour son identification, tant interne

qu’externe. C’est un personnage complexe, cohérent, qui n’a pas de secret17

. On peut trouver des

personnages-définitions d’une part surtout dans la littérature réaliste où les personnages

représentent une personne réelle, un homme ou une femme, avec tout ce qui vient avec, donc

leur physique aussi bien que leur psychologie. D’autre part les personnages-définitions peuvent

11 « postava-definice, postava-hypotéza », ibid., p. 544 12 « […] souborem informací, dynamickou složkou textu […] a je také znakem, dynamickým znakem .», ibid., p. 545 13 Ibid. 14 « […] veškeré explicitní údaje o její podobě, chování, činech, dále její jméno, řeč […] », ibid., p.545-546 15 « […] signifié může být v díle obsaženo explicitně (vypravěčovo hodnocení postavy, tzv. abstraktní

charakteristika) ale častěji, zejména v próze 20. století, je tu přítomno pouze jako potenciální význam, který se

čtenář pokouší nalézt ve své interpretaci », ibid., p. 546 16 Ibid., p. 547 17 Ibid., p. 556

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être des personnages schématisés, des personnages types de la littérature d’aventures, de la

littérature boulevardière, ou l’intérieur des personnages est fonctionnel, schématique.18

Passons maintenant au personnage-hypothèse. « Son signifié dans l’œuvre même est

ouvert, le personnage peut acquérir des significations variées, non seulement pour le lecteur

mais aussi pour les autres personnages qui figurent dans l’œuvre […] »19

. Aussi « […] nous

caractérisons le personnage-hypothèse comme explicable seulement partiellement, pas tout à fait

explicite, déterminé seulement de façon incomplète. »20

Ses contours ne sont pas donc clairs,

concrets : « […] le personnage n’est pas vu comme une totalité, comme un ensemble tout fait au

moment de la création et il est seulement comme transporté dans l’œuvre ; il et une silhouette,

un fragment […] que l’auteur essaie de reconstruire dans le texte […] ».21

Le comportement des

personnages-hypothèses n’est pas prévisible comme le comportement des personnages-

définitions qui sont entièrement connus même de leur intérieur : « La « finitude » du

personnage-définition est liée à la prévisibilité absolue du comportement des personnages, qui

est […] conforme au psychologisme littéraire et à la conception traditionnelle de certains types

humains et sociaux […] Vers le personnage-hypothèse tendent au contraire les personnages,

dont le comportement imprévisible se retrouve en contradiction avec les conditions littéraires

traditionnelles et psychologiques […]. »22

Donc le personnage-hypothèse n’est pas caractérisé

psychologiquement, il ne suit pas souvent une logique psychologique, qu’on attend de lui, il se

comporte de façon illogique ou inintelligible. Le personnage-hypothèse n’est pas beaucoup

décrit par le narrateur, de l’extérieur : « Un autre moment, qui signale déjà le transfert partielle

au personnage-hypothèse est la méthode de la caractérisation interne du personnage. »23

Mais

il faut dire que le personnage-hypothèse n’est pas lié seulement au narrateur « caché », interne,

mais il n’est jamais lié à un narrateur omniscient.24

18 Ibid., p. 555 19 « Její signifié je otevřené přímo v díle, postava může nejen pro čtenáře, ale i pro ostatní postavy v díle nabývat

různých významů […] », (přel. aut.), ibid., p. 546 20 « […] postavu-hypotézu charakterizujeme jako vysvětlitelnou jen částečně, nezcela explicitní, neúplně

determinovanou. », (přel. aut.), ibid., p. 547 21 « […] není postava nahlížena jako totalita, celek ve chvíli tvorby hotový a do díla pouze přenesený, ale jako

silueta, torzo[…]a které se autor pokouší rekonstruovat […] »,(přel. aut.), ibid., p. 546 22

« S « hotovostí » postavy-definice souvisí absolutní předvídatelnost chování postav, které je […] v souladu s

literárním psychologismem a tradičním pojetím určitých lidských a sociálních typů.[…] Naopak k postavě-hypotéze

míří takové postavy, jejichž nepředvídatelné chování se ocitá v rozporu s psychologickými i tradičně literárními

předpoklady […] », (přel. aut.), ibid., p.557 23 « Dalším momentem, který signalizuje už částečný přechod k postavě-hypotéze, je postup skryté charakteristiky

postavy […] » (přel. aut.), ibid. 24 Ibid., p. 556

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En effet, on pourrait dire que le personnage-hypothèse est un personnage non fait, sans

caractère fixe, qui se construit dans l’œuvre, et que nous ne pouvons jamais indiquer comme

connu ou achevé dans le texte, que seul le lecteur crée dans son imagination d’après quelques

informations données. Au contraire le personnage-définition est un personnage défini

complètement, qui achève un certain développement dans le temps et dans l’œuvre même, sans

que le lecteur doive y intervenir.25

3 Alain Robbe-Grillet

Alain Robbe-Grillet, ingénieur agronome, cinéaste et romancier, l’auteur du roman La

Jalousie, est né en 1922 à Brest dans une famille de « libres-penseurs […] anarcho-

monarchistes »26

, d’après sa parole. Après les études classiques, il s’oriente vers les

mathématiques et la biologie et il entre plus tard à l’Institut national agronomique. Il est diplômé

en 1945.

Il occupe plusieurs postes pendant sept ans au sein d’organismes officiels de recherche. Il

est intéressant de remarquer pour ce travail, qu’avant de devenir écrivain, il travaillait aussi

comme un cultivateur des bananiers aux Indes Occidentales. Ce type de travail ne le contente pas

et il se met à écrire des romans, hors-règles, dont les héros et la structure sont très éloignés des

formes romanesques traditionnelles. Même si son premier roman, Un régicide, n’a pas eu du

succès, il a abandonné la carrière d’agronome et se livre à l’écriture. Sa deuxième œuvre Voyeur,

qui paraît en 1955, suscite déjà de vives réactions, surtout de la part de la critique, dont l’accueil

n’a pas été très chaleureux. Robbe-Grillet devient conseiller littéraire des éditions de Minuit, qui

sera son éditeur pendant vingt-cinq ans. Il réunit autour de lui un groupe de romanciers, qui ont

renoncé, comme lui, aux règles du roman traditionnel, comme Claude Simon, Michel Butor et

Nathalie Sarraute, et le mouvement du Nouveau roman est né.

Son roman La Jalousie, paru en 1957, le rend célèbre dans le monde entier, même si

c’était un échec financier complet. D’ailleurs, l’auteur affirme, que ses livres sont

autobiographiques.

25 Ibid., p. 561 26 Cité le 18 avril 2009 depuis http://www.lespierides.com/in/biographie.html

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La Jalousie a été déclaré par Vladimir Nabokov, un romancier russe, le meilleur livre du

siècle et il est traduit en une trentaine de langues. Après ce roman Robbe-Grillet écrit encore

Dans un labyrinthe en 1959 et un peu plus tard, en 1963, paraît sa théorie du Nouveau roman, le

livre, qui s’appelle Pour le nouveau roman. Il déclare que c’est une défense contre les attaques et

des incompréhensions de son roman.

Il a écrit également quelques scenarios de film, par exemple L’année dernière à

Marienbad, réalisé par Alain Resnais. Il a lui-même réalisé quelques films, entre autres

L’immortelle en 1963 et La belle captive en 1983.

3.1 Le roman La Jalousie

Ce roman se déroule peut-être aux Indes, mais cette information n'est pas indiquée dans

le livre. Nous le déduisons du fait que l'auteur, qui a déclaré que ses livres sont

autobiographiques, cultivait des bananiers aux Indes. Le bananier est une plante qui se cultive à

la plantation, où se déroule l’histoire du livre.

Quant à l’histoire, en fait, il n’y en a pas de vraie histoire, on est seulement des témoins

de l’existence d’un narrateur et deux autres personnages, A... qui est supposée d’être sa femme,

et Franck, un ami de famille.

Le narrateur, nous supposons que c’est le mari, décrit tout par sa vue, il ne s’exprime

jamais directement, seulement parfois indirectement. Il décrit la maison ou les parties de la

maison, par où il passe et aussi les visites de Franck. Sa préoccupation principale paraît être

d'observer sa femme, et si elle n’est pas là, de chercher dans ses affaires la preuve d’un adultère

qu’il suppose se dérouler entre A... et l’ami de famille Franck.

Il y a quelques scènes dans le livre qui se répètent toujours. C’est par exemple la

conversation sur les problèmes avec le camion, l'écrasement du mille-pattes, la conversation sur

les préparations pour le voyage en ville, sur le livre, que Franck et A... lisent et aussi ils parlent

de Christiane, femme de Franck, qui se sent toujours trop mal pour rendre visite à A..., qui

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l’attend presque toujours, mais en vain. Le livre est donc une suite des répétitions, de situations

similaires mais pourtant chaque fois différenciées par quelque petit trait.

Pour décrire une simple histoire, Franck arrive souvent (peut-être) sur la plantation du

narrateur et de sa femme. Ils mènent des conversations ennuyantes, sur des soucis quotidiens sur

la plantation. Franck, qui a eu des problèmes avec un camion, doit se procurer un autre dans la

ville et il leur vient une idée que A... pourrait aller avec lui. Elle part donc tôt le matin le jour

convenu. Elle ne revient pas le soir, mais seulement le matin suivant. C’est à cause de l’accident,

qui s’est passé le soir ou l’après midi, comme ils n’ont pas eu le temps de faire réparer la voiture,

ils ont dû descendre dans un hôtel. On assiste plus tard à une conversation qui se déroule après la

ville et le thème du camion en panne se répète. Mais A... qui a été toujours agréable avec Franck,

devient un peu malicieuse envers lui, il s’est passé donc quelque changement entre lui et Franck.

4 Personnages dans le roman La Jalousie d’Alain Robbe-

Grillet

Les personnages dans le roman La jalousie ne sont pas en général trop définis, leur

physique est décrit de manière plutôt objectale, leur intérieur nous reste caché et nous pouvons

seulement deviner la nature de leur caractère par leurs actions, leurs gestes et leur parole.

Pour cette raison, nous pourrions en déduire, qu’il s’agit seulement des personnages-

hypothèses : le narrateur ne s’y prononce pas et ils se caractérisent seulement par leur

comportement. Mais il y a pourtant certaines différences d’avec la notion de personnage-

hypothèse qu’on va analyser.

4.1 Franck

D’après quelques informations que nous avons sur Franck, c’est un ami de famille de

A..., ou plutôt un ami de A... et son mari, le mari, que nous supposons exister. C’est un planteur

aussi, il est possible, qu’il cultive des bananiers, mais nous savons surtout, qu’il a des problèmes

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avec des chauffeurs et avec des camions et qu’il doit aller se procurer un nouveau camion en

ville.

4.1.1 Le nom, la description physique

Le nom de Franck semble comme le nom Frank francisé. C’est un nom qui laisse une

impression ordinaire et courante, nous percevons le nom de Frank comme assez fréquent en

Angleterre ou aux Etats Unis. Nous avons donc seulement le prénom, le nom n’est pas indiqué.

Ce prénom nous donne un certain sentiment de familiarité de Franck, un ami de la famille d’A...,

une absence de formalité mais en même temps l’anonymat, parce que nous ne savons pas

exactement, qui est Franck, à part qu’on sait définir quelques de ses traits typiques.

La description physique de Franck n'est pas trop détaillée. Comme les autres descriptions

des personnages dans l'œuvre, elle ne donne pas des traits concrets complexes, seulement des

fragments, des reflets. Quant à l'apparence physique, Franck n'est pas décrit du tout, son

physique est mentionné seulement en tant que l'actant dans les situations, ses extrémités et son

corps plutôt comme un objet qu'un sujet avec des traits d'un être vivant. « Ses deux avant-bras

reposent à plat sur les accoudoirs. »27

Mais un seul fois, nous recevons une information sur sa

main, qui est « brune, robuste » dans le moment, où elle repose sur la main d’A... où il est ajouté

aussi une mention d’un anneau d’or, cette marque du mariage, que porte A..., elle aussi, « un

modèle analogue »28

.

4.1.2 Les vêtements

Nous recevons quelques informations brèves sur les vêtements de Franck: « Il n'a ni veste

ni cravate, et le col de sa chemise est largement déboutonné ; mais c'est une chemise blanche

irréprochable, en tissu fin de belle qualité, dont les poignets à revers sont maintenus par des

boutons amovibles en ivoire.»29

Ceci nous donne l’impression de quelqu'un de décontracté, de

quelqu'un à l'aise, qui ne suit pas servilement des règles sociales, qui sait se détendre. La

description de la chemise souligne sa blancheur comme à l'opposé de ce style d'habillement peut-

être un peu négligé, pour maintenir de Franck une image d'homme de la société, qui sait

27 Alain Robbe-Grillet : La jalousie, Les éditions de minuit, Paris, 1957, p. 29 28 Ibid., p. 113 29 Ibid., p. 21

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s'habiller ou qui porte des vêtements correspondant à son niveau social. Nous voyons des détails

de la chemise, des boutons, qui sont amovibles et en ivoire, cette information nous fait imaginer

la localité de l'Afrique ou des Indes.

Cette image de Franck d’un homme bien habillé du milieu social plus aisé est soulignée

par d'autres descriptions. Franck, revenant de la ville « […] avait aujourd’hui des souliers à

semelles de cuir, avec son complet blanc […]. »30

Les souliers à semelles de cuir sont plutôt des

chaussures de luxe, le complet de la couleur blanche réfère au climat tropical.

Nous voyons Franck aussi habillé en style un peu plus décontracté. Il est assis avec A...,

quelqu’un est venu chercher de la glace (le mari ?), Franck « […] est vêtu d'un short et d'une

chemise kaki à manches courtes, dont les pattes d'épaules et les poches boutonnées ont une

allure vaguement militaire. »31

On apprend aussi, qu’il porte des chausseurs de tennis, un autre

accessoire sportif. Mais cette poche entre sur la scène plus tard: « La main brune […] remonte

soudain jusqu’à la pochette de la chemise, où elle tente à nouveau, d’un mouvement machinal,

de faire entrer plus à fond la lettre bleu pâle, pliée en huit, qui dépasse d’un bon centimètre. »32

Nous y trouvons un nouvel élément, une lettre. Franck tente de la cacher, ou au moins de

l’enfoncer dans la poche. La chemise et la poche sont décrites plus en détail : « […] la chemise

est en étoffe raide […] dont la couleur kaki a passé légèrement par suite des nombreux lavages

[…] Sous le bord supérieur de la poche court une première piqûre horizontale […] A l’extrémité

de cette pointe est cousu le bouton destiné à clore la poche en temps normal. » 33

C’était donc la

chemise et nous y trouverons la lettre : « La lettre, au-dessus, est couverte d’une écriture fine et

serrée, perpendiculaire au bord de la poche. »34

L’écriture elle-aussi est examinée. On y ajoute

qu’elle est fine et serrée, donc le narrateur ou celui qui le contemple essaie de la reconnaître. Le

soin de l’examen et l’attention portée sur les détails et les fonctions des parties que le narrateur

destine à la description de cette poche et de cette chemise dénoncent l’intérêt qui y est porté.

En fait, on peut dire que Franck est décrit dans trois situations. La première fois, en

introduction, il y a une description générale. Les deux autres sont plutôt fonctionnelles, on voit le

changement, le nouvel élément qui y est ajouté et cet élément a une signification spéciale. C’est

30 Ibid., p. 88 31 Ibid., p. 46 32 Ibid., p. 113 33 Ibid., p. 114 34 Ibid., p. 114

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une des situations clés dans l’œuvre, c’est une des raisons de la jalousie, la lettre comme un

élément suspect de la communication cachée entre A... et son amant potentiel Franck.

4.1.3 Le comportement de Franck

Le comportement de Franck est malgré le ton analytique, décrit souvent avec un certain

ton de jugement ou d’attitude subjective. On peut en déduire une certaine partialité du narrateur

envers Franck. Voyons quelques indices : « Il absorbe son potage avec rapidité. Bien qu’il ne se

livre à aucun geste excessif, bien qu’il tienne sa cuillère de façon convenable […] il semble

mettre en œuvre […] une énergie et un entrain démesurés. Il serait difficile de préciser où,

exactement, il néglige quelque règle essentielle […]».35

Cette description possède une certaine

nuance personnelle, il paraît que Franck gêne le narrateur, qui semble trop l’observer et chercher

des défauts. Il ne peut pas donner des preuves pourquoi Franck paraît tellement inconvenant,

mais il le juge simplement un peu excessif dans ses mouvements. Mais la hâte avec laquelle

Franck consomme est visible aussi dans sa façon de boire. En parlant de la voiture en panne, en

riant, et il « […] saisit son verre […] et le vide d’un trait, comme s’il n’avait pas besoin de

déglutir pour avaler le liquide : tout a coulé d’un seul coup dans sa gorge. »36

Cette scène se

répète, mais dans des circonstances différentes, quand Franck s’en va et il veut partir vite : « […]

le verre qu’il vient de finir d’un trait. »37

. On a l’impression qu’il se sent gêné à cause d’A..., qui

a des remarques ambigües, qui pourraient paraître des allusions à leur affaire.

La manière de consommer de Franck est décrite encore plus loin dans le texte. Cette fois-

ci, il s’agit d’une description presque géométrique. La gesticulation ou la manipulation avec la

fourchette, le couteau et le repas sont décrites comme une image qui bouge, un objet, ou des

objets qui changent leurs positions, en soulignant la démesure des gestes : « […] les mouvements

nombreux et très accusés qu’il met en jeu : la main droite qui saisit à tour de rôle le couteau, la

fourchette et le pain, la fourchette qui passe alternativement de la main droite à la main gauche

[…] la main droite saisit le pain et le porte à la bouche, la main droite repose le pain sur la

nappe blanche et saisit le couteau, la main gauche saisit la fourchette, la fourchette pique la

35 Ibid., p. 23 36 Ibid., p. 110 37 Ibid., p. 200

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viande […] »38

Cette description pourrait presque servir comme un mode d’emploi de l’usage du

couvert au repas.

Nous apprenons par tous ces extraits que le comportement de Franck porte des traits

d’une certaine impatience ou de hâte. Il est vital, il a un « appétit considérable », ses gestes sont

énergiques, parfois même trop. Mais tout de même, il suit les règles et les convenances, il ne s’en

écarte pas, plutôt par l’impression qu’il crée que par des actes concrets. A part peut-être une

tache qu’il fait en mangeant « Juste à côté, la lame du couteau a laissé sur la nappe une petite

tache sombre, allongée, sinueuse, entourée de signes plus ténus. »39

Nous voyons cette énergie aussi dans une scène avec la scutigère, un mille-pattes, Franck,

en l’apercevant, réagit vite, prend la serviette, tue la scutigère, et même console A..., effarouchée

par cette bête désagréable. Il réagit de la façon semblable, décidée, pendant un soir, quand un

animal nocturne crie pas loin de la terrasse dans l’obscurité, il « […] se relève d’un mouvement

rapide et se dirige à grands pas de ce côté. »40

A... le suit un peu plus tard.

.

4.1.4 Le caractère de Franck

En ce qui concerne l’intérieur de Franck, son caractère, comme chez tous les

personnages, il n’est pas décrit et on peut le déduire seulement de ses actions et de son

comportement. Au début nous voyons Franck « se laisser tomber » dans un fauteuil sur la

terrasse, il est « souriant, loquace, affable »41

, il est venu pour le dîner. Nous retrouverons cette

caractéristique encore plus tard, ne sachant pas, s’il s’agit de la même scène réinterprétée ou

d’une autre scène semblable. La plupart des scènes dans le livre reviennent et se répètent avec de

mêmes variations : « Celui-ci est encore là pour le dîner, affable et souriant »42

Donc c’est

presque la même caractéristique qu’avant et elle se répète encore : « Pour le déjeuner Franck est

encore là, loquace et affable […] »43

On est donc sûr que Franck est loquace et affable, pour

souligner, on le retrouve comme il : « […] raconte […] riant et faisant des gestes avec une

énergie et un entrain démesurés […] »44

.

38

Ibid., p. 111 39 Ibid., p. 113 40 Ibid., p. 208 41 Ibid., p. 17 42 Ibid., p. 58 43 Ibid., p. 197 44 Ibid., p. 110

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Les manières distinguées ou son esprit de la mesure, qu’il respecte, même si son

expression n’est pas toujours ajustée, sont visibles pendant une conversation sur une héroïne du

roman, qu’ils lisent avec A… . Une héroïne « accorde ses faveurs aux indigènes » et « Franck

paraît sur le point de lui en faire un grief. »45

Il trouve ce comportement un peu drôle, au

contraire de sa voisine, qui n’y trouve aucun problème. Franck est donc un peu plus conservateur

que sa voisine A... .

Franck est aussi un lecteur, comme A..., ce qui n’est pas tellement typique pour un

homme, surtout pour ce genre de littérature. C’est un roman, dont l’histoire se déroule en

Afrique dans le milieu d’une plantation. Il paraît qu’il s’agit de la littérature romantique, un peu

aventureuse, le sujet devrait traiter d’un adultère. Franck est ainsi plus proche d’A... avec

laquelle il partage aussi ce loisir. Il veut se divertir un peu, et cette lecture peut lui fournir un

certain divertissement.

Quant à la parole de Franck, elle a un caractère stéréotypé, comme chez les autres

personnages, parce que les dialogues se répètent toujours et traitent seulement des affaires

quotidiennes, ennuyantes. Ils laissent rarement exprimer les personnages, il s’agit pour la plupart

des phrases de politesse, de la communication quotidienne, où on répète les mêmes

formules : « Ce qu’on est bien là-dedans ! »46

en s’asseyant dans le fauteuil. Et Franck redit tout

à fait la même phrase encore plus tard.47

La phrase qui revient plusieurs fois chez lui est aussi

l’annonce, qu’il va partir. « Je crois que je vais rentrer. »48

, « Quand même je crois que je vais

partir. »49

, mais cette phrase a une signification différente avant le séjour en ville et après ce

séjour. Avant, c’est plutôt une phrase de politesse, car Franck ne se lève pas vraiment pour partir,

il préfère rester. Après le voyage, cette phrase est suivie d’un acte réel, il est évident, que Franck

n’est pas tellement intéressé à rester : « Il s’est juste arrêté en passant, pour déposer A... […] il

se lève en effet de son fauteuil, avec une vigueur soudaine […]. »50

La plupart du temps, il parle de la panne qui est arrivée à son camion, il se plaint des

chauffeurs indigènes, qu’il juge trop irresponsables pour conduire un camion tout neuf : « Mais il

a bien tort de vouloir confier des camions modernes aux chauffeurs noirs […] »51

, et « S’il avait

45 Ibid., p. 194 46 Ibid., p. 58 47 « Ce qu'on est bien là-dedans ! » , Ibid., p. 189 48 Ibid., p. 30 et 87 49 Ibid., p. 194 50 Ibid., p. 87 51 Ibid., p. 25

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un peu plus d’expérience, il saurait qu’on ne confie pas de machines modernes à des chauffeurs

noirs […] ». Il se reproche aussi l’achat du vieux matériel militaire de faible qualité : « […] et

c’est bien la dernière fois - dit-il - qu’il achète du vieux matériel militaire. »52

Il parle de la

panne encore plus tard, mais ce n’est plus une plainte, c’est une excuse et une explication en

même temps, parce qu’il parle de la panne qui s’est produite pendant son voyage avec A... en

ville, à cause de laquelle ils devaient y rester pour la nuit. « Au moment de mettre en route, après

le dîner, le moteur n’a plus rien voulu savoir. […] ». Et le commentaire du narrateur : « Les

phrases se succèdent […] de façon logique […] ressemble de plus en plus à celui du témoignage

en justice, ou de la récitation. »53

. Il reparlera sur ce sujet encore une fois, on n’est pas sûr si

c’est une troisième panne, mais il en parle beaucoup et il semble être très averti, il est très

loquace : « […] Franck se met à raconter, avec un grand luxe de détails, une histoire de voiture

en panne. »54

Ce dialogue a l’air de se dérouler après le séjour en ville et on y voit bien le thème

identique mais développé dans une atmosphère différente, où la position de Franck est toute

autre, il a l’air de se défendre et d’essayer d’attirer l’attention. Il utilise une langue technique

pour se donner de la crédibilité.

Le discours de Franck n’est pas très varié, il ne le définit pas de façon plus personnelle, il

le définit plutôt par un style ou par l’utilisation de certaines phrases répétitives qui deviennent

typiques pour lui.

4.1.5 Christiane

On sait que Franck est marié et qu’il a un enfant, mais il ne parle pas beaucoup de sa

femme, Christiane, sauf si on lui demande. Il a l’air d’être ennuyé par des maladies permanentes

de sa femme « Toujours la même chose »55

, « Toujours pareil »56

, qui a toujours mal à s'habituer

au climat trop chaud, de même que son enfant, qui est maladif comme sa mère et qui est une

raison de plus pour ne pas participer aux visites chez A... avec son mari : « Christiane, cette fois ,

ne l’a pas accompagnée ; elle est restée chez eux avec l’enfant, qui avait un peu de fièvre. »57

On

lui demande même d’aller avec Franck et A... dans la ville pour changer des idées58

, mais elle

52 Ibid. 53 Ibid., p. 5 54 Ibid., p. 197 55 Ibid., p.193 56 Ibid., p. 55 57 Ibid., p. 17 58 Ibid., p. 192

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refuse. Elle donne une image indifférente, de quelqu’un qui a toujours des problèmes à

s’accoutumer et qui préfère de rester à la maison. Comme nous l’apprenons, elle a beaucoup de

serviteurs, et mal dirigés, ce qui est en contraste avec A..., qui n’avait jamais de problème de

s’entendre avec ses serviteurs.

Elle se prononce dans l’œuvre seulement dans les conversations entre Franck et A..., où il

traduit ses excuses pour ne pas venir, mais elle s’exprime une fois de façon un peu plus directe,

quand le messager de Franck vient annoncer le matin que son maître n’est pas arrivé jusqu’à

maintenant et que « La dame, elle est ennuyée. »59

, rien de plus. Le narrateur examine les sens

possibles de la phrase en proposant des significations possibles, que cette phrase générale

pourrait porter. Ce mot provoque beaucoup de synonymes plus émotionnels, mais on doit se

contenter avec cette expression simple, qui d’ailleurs est la conséquence d’une mauvaise

connaissance de la langue d’un messager indigène, qui ne sait pas s’exprimer de la façon plus

concret. Ici on voit pour la première et la seule fois le mot « jalouse », à l’exception de la

description des jalousies dans le bureau. On reçoit quand même une information sur la dispute ou

presque dispute entre Franck et sa femme pour la robe de A..., que Christiane juge trop serrée et

donc inconvenable pour le climat tellement chaud60

. Mais cette remarque a l’air plutôt d’une

remarque jalouse contre l’attractivité de A, qu’une remarque soucieuse de la santé de A... .

Christiane donc jalouse A... mais cela ne l'encourage pas à s’occuper davantage de son mari.

4.1.6 Franck - personnage-définition ou personnage-hypothèse ?

Est-ce que Franck est un personnage-définition ou un personnage-hypothèse ? Regardons

ses caractéristiques : est-ce qu’il est caractérisé dans le texte ? A-t-il un certain trait typique ?

Nous avons cette constatation : « loquace, affable ». Cette caractéristique est répétée plusieurs

fois dans le texte, sans un changement notable. Ce qui est important, c’est s’il se comporte

vraiment ainsi. Un des traits du personnage-hypothèse est, que son comportement n’a pas une

complexité, une logique, et que ses caractéristiques peuvent se contredire, car elles ne

représentent pas un ensemble cohérent. Qu’est-ce que nous voyons donc dans le texte ? En bref,

chaque fois que Franck arrive, il se laisse tomber dans un fauteuil, pousse son cri habituel sur le

confort du fauteuil et il commence à raconter ses « soucis de la journée sur sa propre

59 Ibid., p. 178 60 Ibid., p. 10

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plantation. » 61

C’est pour la plupart lui, qui parle, A... plutôt réagit à quelques-unes de ses

propositions ou l’encourage à parler, lui demande la santé de Christiane ou autre chose. On peut

donc dire, qu’il est loquace. Il parle beaucoup. Concernant son affabilité, il ne prouve jamais un

certain déplaisir, ou désobligeance. Quand sa boisson n’est pas assez fraîche, il ne veut pas faire

des soucis : « Bah ! […] ça n’est peut-être pas la peine. »62

. Et on ne trouve aucune situation où

il se comporterait autrement. On lui reproche de se présenter avec une animation un peu

excessive, mais cette animation est présentée toujours dans les mesures des règles sociales, il

n’est pas désagréable ou maussade, il est toujours vivace et communicatif. Seulement dans des

situations, qui sont d’après les circonstances un peu moins favorables pour lui, nous le voyons un

peu moins bavard. Il s’agit de la situation après le voyage en ville, où nous supposons la

possibilité et la réalisation de l’adultère. C’est là qu’il se sent, ou il semble qu’il se sent un peu

gêné devant A... (et son mari peut-être). Mais cela est compréhensible et logique (dans le cas de

l’adultère, mais celui-ci est fortement probable d’après toutes les donnés). Nous pouvons donc

dire, qu’il est affable mais aussi dans les cas, où il ne l’est pas, nous comprenons pourquoi et il

réagit d’une façon logique et explicable.

Pour sa caractéristique physique, on a déjà dit, qu’il est décrit plutôt comme un objet

bougeant, qu’un homme avec ses traits caractéristiques. On voit son habillement et probablement

une seule caractéristique physique, sa main, « brune, robuste ». Quant à ses vêtements, on peut

dire, qu’ils le caractérisent assez bien. Il porte un costume habituel des hommes aisés, des

planteurs, dans les tropiques ou subtropiques, il porte une chemise « blanche irréprochable », qui

est « largement déboutonnée », un « complet blanc, les souliers en semelle de cuire », le

vêtement de bonne qualité, qu’on pourrait désigner comme typique pour ce type de gens, des

gens « blancs » dans les colonies, des propriétaires des plantations. Il ne s’écarte pas donc d’une

image générale, qu’on porte sur ce type de gens.

Quant à ses émotions et ses sentiments, ils ne sont pas tellement nombreux, mais quand

même, si on les voit, on les voit bien. S’il est fasciné par exemple par la beauté d’A..., il ne le

cache pas trop et dans une scène, où elle lui prépare la boisson, il l’observe en se fixant sur elle

tout en oubliant de suivre la dose d’alcool. S’il se sent gêné et un peu mal à l’aise, après le

voyage en ville, en partant, il n’est pas capable de tenir le masque souriant, il se transforme en

« grimace »63

, qu’on voit revenir plusieurs fois dans le texte. Et quand il reparle de la panne de la

61 Ibid., p. 20 62 Ibid., p. 48 63 Ibid., p. 88

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voiture, avec un peu trop de détails, comme s’il voulait prouver sa compétence dans la

mécanique des voitures, (cette conversation devrait se dérouler après le voyage), il demeure

confus après une remarque un peu méchante sur ses grandes capacités de mécanicien, que fait

A... sur son compte, et il n’est pas capable de continuer. Il paraît essayer de se justifier, son

comportement paraît être motivé, il semble essayer de dénier son échec en tant que mécanicien et

il semble qu’il voudrait ainsi dénier le (possible) adultère, dont il est suspect. On le retrouve dans

une conversation presque pareille, où il se justifie. Mais c’est l’argumentation d’un fait contraire,

où il explique, que la panne a été tout à fait impossible à réparer et qu’il n’en était point

coupable. C’est la justification qui paraît se dérouler juste après la ville, où même A... confirme

ses propos, « Pas de chance […] mais ce n’est pas un drame. »64

. Donc on voit bien sa

motivation, il ne cache pas ses sentiments et il laisse découvrir, même inconsciemment, la

marche de sa réflexion, il n’a pas de secret, même s’il le voulait peut-être.

Le nom, ou le prénom de Franck est un prénom habituel, on n’y voit aucun trait spécial à

part qu’il a l’air d’un nom anglais francisé, comme on a déjà dit. Ce fait nous donne l’impression

d’une colonie, où se mélangent les Anglais et les Français peut-être. Le fait que c’est un simple

prénom nous réfère à une relation amicale que Franck entretient avec la famille d’A... . C’est un

quelconque Franck, un ami. Ce prénom aussi correspond à l’image d’un planteur typique, portant

un des noms étrangers communs, peu différenciés, neutres. En définissant le rôle du nom chez un

personnage-définition, on nous dit qu’on peut y trouver des noms allégoriques, qui expriment le

caractère du personnage ou « […] des noms neutres, courants, quotidiens, qui se joignent

naturellement avec le personnage, ils caractérisent le personnage seulement de façon

approximative […] »65

Mais en même temps, on nous dit que le nom neutre, courant ne doit pas

nécessairement signifier un personnage-définition, le choix du nom du personnage permet

seulement de reconnaître certaines tendances.66

Donc, en prenant en compte toutes ces données, le personnage de Franck nous paraît

plutôt comme un personnage-définition qu’un personnage-hypothèse. Son signifiant, ses traits

sont décrits un peu insuffisamment, mais son signifié, ce qu’il est vraiment, est assez concret.

C’est surtout par son caractère assez clair et prévisible, par un caractère typique de ce

personnage, auquel contribue par exemple son nom « commun », son apparence d’un homme de

société avec des manières distinguées, bien vêtu, même si un peu trop causeur, qui répète

64 Ibid., p. 87 65 Hodrová D. a kolektiv: ...na okraji chaosu... , op. cit., p. 558 66 Ibid., p. 559

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toujours les mêmes phrases. Mais cela fait partie de son image et de son caractère. Il bouge, il

parle de la façon qui ne nous surprend pas, même à la fin, il achève son rôle de séducteur un peu

déconcerté et confus, qui ne sait trop se comporter et dissimuler le sentiment d’ennui ou

d’embarras, qui viennent après ce flirt achevé (supposé) dans la présence d’un mari trompé et de

sa femme (peut-être) coupable. Il essaie de se défiler le plus tôt possible. Il ne présente donc

aucun mystère pour un lecteur et il prend très tôt sa place dans l’histoire.

4.2 A...

A… est un personnage le plus surveillé dans l’œuvre, elle se trouve au milieu de

l’intérêt du narrateur. Même pendant son absence, le narrateur cherche des objets, qui sont liés à

elle, il l’a cherche plus ou moins consciemment. D’après le contexte, on suppose qu’elle est une

femme du narrateur, qu’elle est une femme de mari qui ne se prononce jamais dans le texte. Elle,

ou ils n’ont pas d’enfant. Elle est plutôt jeune, elle devrait être attractive. Malgré l’absence de

l’estimation explicite sur son physique, on peut déduire sa beauté du fait (supposé) qu’elle est

désirée par deux hommes et (probablement) jalousée par son mari. Son physique est de plus

mentionné beaucoup plus souvent que le physique de Franck et malgré le ton neutre, on peut y

trouver un certain point d’appréciation.

A... est présentée comme une femme agréable, souriante, elle ne montre pas ses

problèmes, mais elle est un peu énigmatique, on ne sait pas ce qu’elle pense. Ses relations avec

son alentours sont bons, elle s’entend bien même avec Christiane, femme de Franck, qu’elle

vient voir et à laquelle elle s’intéresse chaque fois, que Franck vient chez eux. Elle s’entend bien

aussi avec les indigènes, avec ses serviteurs.

On ne sait pas quel est sa relation avec son mari, qui est en fait absent dans le roman,

mais dans quelques situations, où on peut le découvrir, il est plutôt omis par elle, elle se

concentre à Franck.

Au début, ou, on suppose, que c’est au début, Franck est recherché et apprécié par elle,

elle s’intéresse à ces problèmes, elle le retient pour ne pas partir. Après le voyage (on suppose

que c’est après), sa relation avec lui se refroidit, elle ne le retient pas, n’est pas peut-être

tellement intéressée à lui et même elle est un peu méchante avec lui.

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Elle se divertit par la lecture d’un roman, peut-être sentimentale. Avec Franck, ils

échangent leurs avis sur les personnages, sur le possible dénouement de l’histoire, cela leurs

amuse et devient aussi une bonne source de conversation et une prétexte pour passer le temps

ensemble.

Même si elle donne une impression d’une femme à laquelle rien ne fait pas problème et

rien ne la surprend, la scutigère, qui apparaît en face d’elle pendant le repas, la choque, lui fait

peur, elle ne crie pas mais elle demeure toute effarouchée.

4.2.1 Le nom et le physique de A...

Comme on a déjà dit, A... est belle. Ou au moins elle laisse cette impression en nous. Ses

descriptions sont nombreuses, mais ils se répètent, comme dans la plupart du texte, des mêmes

scènes, des mêmes descriptions, différenciées seulement par quelques détails, comme si le

narrateur la voyait ou la rappelait surtout dans certaines positions, pendant certaines activités.

Donc tout cela paraît comme une description, reprise plusieurs fois, qu’on voudrait achever, mais

on seulement ajoute quelque chose et on ne complète pas l’image et la situation.

Les descriptions dans le roman sont en générale faites plutôt de manière géométrique, des

descriptions des objets, de leur apparence matérielle, en effaçant chaque lien avec eux, on ne les

présente que comme des objets simples en mouvement. La description de A… n'est pas de ce

genre, simplement, elle dénonce quelque lien entre A... et le narrateur, même si celui-ci est réduit

au maximum. Mais il y reste des traces des mouvements psychologiques, des réactions sur

quelques impulsions, qui n'étaient pas des réactions d'un objet sur un autre objet mais

découvrent certaines expectations cachées, certaines idées, qu'on porte d'un autre, d'après ce qu'il

représente pour nous. Ils dénoncent une relation proche d’un homme envers une femme aimée.

Son nom est une initiale, avec trois points, qui réfèrent à quelque chose d'inconnu. Elle

n'a pas donc un vrai nom, son nom ne dit rien, mais on peut dire que cette initiale donne une

impression douce en tant qu'une voyelle, mais aussi résolue, de la première lettre de l'alphabète.

Les points dans son nom indiquent quelque chose qui n'est pas nommé, c'est comme avec son

caractère qui n'est pas défini, qui se réfère au lecteur, qui doit le découvrir.

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Quant à la description physique, on voit revenir souvent la description des cheveux de

A..., « les boucles noires »67

, « les boucles noires et brillantes »68

, « boucles souples, lourdes »69

.

Ces descriptions démontrent déjà un certain niveau d’implication personnelle de l’observateur.

Les cheveux sont « brillants », ce sont des boucles, pas des cheveux ondulés simplement, ces

descriptions ajoutent une certaine différence entre l’objet qui brille et les cheveux brillantes.

Les cheveux réapparaissent dans plusieurs formes, on parle de la « chevelure peignée »70

,

mais on voit aussi des coiffures concrètes, que A... porte. Le narrateur s’étonne de la complicité

d’un chignon « […] dont les torsades savantes semblent sur le point de se dénouer ; quelques

épingles cachées doivent cependant le maintenir avec plus de fermeté que l’on ne croit. »71

, et

puis « Le chignon de A... vu de si près, par derrière, semble d’une grande complication. Il est

très difficile d’y suivre dans leurs emmêlements les différentes mèches […] »72

, dont il semble

être fasciné, du point de vue « technique », pour lui, c’est un mystère, comment ce grand

ensemble peut maintenir sa forme, « […] plusieurs solutions conviennent, par endroit, et ailleurs

aucune. »73

C’est quelque chose d’irrationnel pour lui, quelque chose qu’il ne peut pas si bien

analyser, c’est plein de certain charme, qui appartient au monde féminin, qu’il ne comprend pas

très bien. Et le narrateur ne se contente pas avec une simple description, il développe les

descriptions en trouvant des allusions avec des autres objets, provoquent en lui des sentiments

peut-être semblables. En fait, cet approche nous paraît comme un effort d’intérioriser les choses,

de priver l’objet de sa forme apparente, un peu limitant, sans laquelle on peut le décomposer en

parties, qui ont chacune son propre sens et ses sens ne sont plus attachés à l’objet et nous

pouvons mieux les élaborer, les examiner et puis les allier avec quelque chose dans notre âme, à

laquelle cela fait référence. Et une fois découpé, décomposé, c’est plus facile à s’en approprier.

Donc pour introduire l’allusion, que les cheveux de A... ont suscité dans le narrateur,

c’était le bruit, qui se produisait pendant que A... peignait ses cheveux. Ce bruit a éveillé en lui

une image de la scutigère, qui, en ouvrant et renfermant sa bouche, produit « un grésillement

léger »74

le craquement, semblable d’après le narrateur (le mari) à celui, que produisent les

cheveux. Une autre allusion de ce bruit est un incendie, similaire par ce bruit, par ce craquement

67 Ibid., p. 10 68 Ibid., p. 15 69 Ibid., p. 42 70 Ibid., p. 42 71 Ibid., p. 45 72 Ibid., p. 52 73 Ibid. 74 Ibid., p. 165

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aussi. L’incendie évoque des émotions, la passion qui est hors du contrôle, des sentiments

brûlants. Dans la pensée du narrateur, les images émergent et se relient d’une façon inconsciente,

d’après leur qualité et leur valeur symbolique, qu’ils représentent pour lui. Ils font donc une

opposition aux descriptions des objets et des hommes souvent rigides, qui ne se réfèrent qu’à la

réalité.

Un autre trait physique de A..., qui est décrit dans le texte, sont ses yeux : « Ses yeux sont

très grands, brillants, de couleur verte, bordés de cils longs et courbes. Ils paraissent toujours se

présenter de face, même quand le visage est de profil […] Elle les maintient continuellement

dans leur plus large ouverture […] sans jamais battre les paupières. »75

Cette description un peu

bizarre nous fait penser à un lézard, qui est décrit un peu plus tôt dans le texte : « Le lézard, sur

la barre d’appui, est maintenant dans l’ombre […] », et aussi : « […] une queue deux fois

tordue, quatre pattes assez courtes et la tête tournée vers la maison. »76

Même si un lézard n’a

pas de cils, elle a cette forme des yeux, qui sont chacun à une côté de la tête et aussi elle ne batte

jamais les paupières, ce qui est assez drôle chez un homme. Cela donne une impression un peu

froid, d’un objet presque. On imagine donc les yeux de A... comme obliques, un peu mystérieux,

l’allusion avec le lézard fait les yeux encore plus préoccupants. Cela est encore plus accentué par

leur couleur verte, qui est souvent attribuée aux sorcières ou aux tricheurs, on dit que les gens

avec les yeux verts ne sont pas francs, ils enchantent les autres et obtiennent ce qu’ils veulent.

Donc tout cela nous fait imaginer des yeux de quelqu’un un peu énigmatique, séducteur, avec

des intentions peut-être pas tout à fait claires.

On nous parle aussi des lèvres de A..., elles sont maquillées, mais par la couleur proche

de leur couleur naturelle : « A... est en train de terminer son discret maquillage : ce rouge sur les

lèvres qui se contente de reproduire leur teinte naturelle […] »77

A... ne se maquille pas trop,

elle semble à suivre sa beauté naturelle, elle n’a pas besoin de s’accentuer, elle paraît être

confidente d’elle-même.

Concernant son corps, on peut remarquer sa stabilité sur les chausseurs à très hauts

talons, quand elle doit faire attention où elle pose ses pieds sur le terrain inégal, mais elle « […]

n’est pas du tout gênée par cet exercice, dont elle n’a même pas remarqué la difficulté, dirait-

75 Ibid., p. 202 76 Ibid., p. 201 77 Ibid., p. 142

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on. »78

. Elle bouge avec une certitude, elle n’a pas peur qu’elle tombe, elle se sent à l’aise avec

ces chaussures très féminins.

Les parties de son corps, souvent décrits comme des objets, parfois émergent, comme on

l’a déjà vu sur les autres exemples, de cette indifférence et se montrent comme des traits

individuels. C’est la « soie blanche de l’épaule »79

, qui nous fait penser à quelqu’un admiré, à

quelqu’un aimé. On ne peut pas parler ainsi, si on est indifférent envers la personne, cette

expression est une expression personnelle, tendre. Le corps de A..., en générale, est un corps

sain, résistant, aisé, la chaleur ne lui cause pas des problèmes de santé comme à Christiane et le

froid ne la gêne pas aussi, « […] elle avait connu des climats beaucoup plus chauds - en Afrique

par exemple - et s’y était toujours très bien portée. Elle ne craint pas le froid non plus,

d’ailleurs. Elle conserve partout la même aisance. »80

Ici vient la remarque de Christiane quant à

la robe de A..., qui lui paraît trop ajustée et d’après laquelle ses vêtements ne sont pas

convenables pour les climats tellement chauds. A... n’y voit pas un problème, elle réagit avec un

sourire. Il est assez visible, que pour Christiane, il ne s’agissait pas d’ailleurs de la santé de A...,

elle était plutôt jalouse de son apparence probablement séduisant dans une robe collante. Cette

robe réapparaît plusieurs fois, A… la porte souvent, ou il paraît qu’elle la porte souvent, parce

qu’on ne sait pas, quelles scènes se répètent et lesquelles sont des nouvelles « Elle est toujours

habillée de la robe claire, à col droit, très collante, qu’elle portait au déjeuner. »81

, « A... porte

la même robe qu’au déjeuner. »82

, « Elle a mis la robe claire, de coupe très collante, que

Christiane estime ne pas convenir au climat tropical. »83

. A... donc aime à séduire, aime à être

attractive, avec ses hautes tallons, et robe séduisante, qui suscite une jalousie en Christiane. Une

autre robe, qui est mentionné dans l’œuvre, c’est une robe blanche, qu’elle porte pendant son

voyage dans la ville84

, mais c’est seulement une remarque courte.

4.2.2 Le comportement de A...

On a déjà dit, que A... est un personnage un peu mystérieux. Elle se comporte avec une

certaine insouciance, elle ne semble jamais être irritée ou triste, on ne la voit pas en mauvaise

78 Ibid., p. 115 79 Ibid., p. 42 80 Ibid., p. 10 81 Ibid. 82 Ibid., p. 21 83 Ibid., p. 94 84 Ibid., p. 115

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humeur. Le matin, elle se lève avec une bonne humeur, souriante : « Elle dit « Bonjour », du ton

enjoué de quelqu’un qui a bien dormi […] ou de quelqu’un, du moins, qui préfère ne pas

montrer ses préoccupations […] »85

Quand on lui dit que pour le voyage, il faudrait se lever plus

tôt, elle réagit d’un ton diverti : « Oh là là... […] Au contraire, c’est amusant. »86

, rit-elle. Mais

en décrivant son sourire matinal, on y ajoute que ce sourire pourrait indiquer « […] aussi bien, la

dérision que la confiance, ou l’absence totale des sentiments. »87

Ce n’est pas donc un sourire

franc, chaleureux, c’est seulement un sourire, dont on ne peut pas deviner la raison ou des

sources plus profondes. Il n’a pas peut-être même ses raisons plus profondes d’un sentiment

quelconque, A... semble peut-être sourire de l’habitude, de la conviction, qu’il ne faut pas

montrer ses problèmes. Elle est aussi agréable à Christiane, elle s’intéresse à elle, se soucie de sa

santé et vient la visiter, elle essaie de trouver une solution à ses problèmes : « En ville, elle aurait

pu voir un médecin. »88

, mais étant donné, qu’elle peut-être séduit son mari, c’est un intérêt un

peu douteux.

Ses gestes sont mesurés, ses mouvements sont exacts et tranquilles. Regardons A...

faisant la même procédure que Franck. La manière de consommation de A... est tout à fait

différent de celui de Franck, A... : « […] vient d’achever la même opération sans avoir l’air de

bouger - mais sans attirer l’attention, non plus, par une immobilité anormale. »89

. A... a donc

une allure organisée, mais pas pédante ou spasmodique, elle se comporte de la façon tranquille,

qui fait toujours des mouvements qu’il faut, mais sans se rendre visible, sans être perçue même

par leur justesse, qui n’est pas forcée, mais naturelle. On ne peut rien lui reprocher au niveau de

l’étiquette, elle se comporte juste comme il faut ; Franck, malgré son effort ou peut-être à cause

de lui, bouge toujours de façon voyante. A... n’a pas l’air d’y mettre aucun effort, elle le fait

automatiquement, mais justement. Voyons une autre scène de la consommation, celle-ci ayant un

caractère encore plus précis, il y a presque des angles et des mouvements et des positions exactes

des objets. « Elle commence, dans son assiette, un méticuleux exercice de découpage […] elle

décolle les membres, tronçonne le corps aux points d’articulation, détache la chair du squelette

avec la pointe de son couteau tout en maintenant les pièces avec sa fourchette […] »90

Elle est

systématique et précise, on a l’impression, qu’il s’agit d’un médecin ou de quelque professionnel

85 Ibid., p. 42 86 Ibid., p. 81 87 Ibid., p. 42 88 Ibid., p. 192 89 Ibid., p. 24 90 Ibid., p. 72

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« […] comme s’il s’agissait d’une démonstration d’anatomie […] »91

. Elle paraît comme une

femme, qui a tout sous le contrôle, même si les autres ne s’en aperçoivent pas, elle sait ce qu’elle

fait et le fait avec précision. Cette allure de précision fait une certaine impression de froideur, de

rigidité, comme son sourire, qui est un sourire, mais qui ne montre aucun sentiment.

4.2.3 Les relations de A... avec les autres personnages

Franck

Sa relation avec Franck a deux phases. Une phase avant la ville et une phase après la

ville. On pourrait dire peut-être qu’il y a encore une phase juste après la ville, parce que cette

phase, elle-aussi, assume quelques traits spéciaux. Mais avant l’analyse-même, il faut ajouter,

que toutes ces évaluations et chronologies temporelles viennent seulement d’une logique

psychologique, qu’on peut y trouver et en déduire. L’auteur mélange des situations et change une

localisation temporelle de tel manière, qu’il ne nous reste que suivre un certain ordre

psychologique des actions et des réactions, qui nous paraît cohérent. Autrement, le roman est

illisible. En fait, l’auteur a déclaré, qu’il ne souhait pas ou ne recommande pas la reconstruction

temporelle, il faut, qu’on lise le roman comme un tout, mais dans ce cas là, ce serait impossible

d’analyser l’histoire ou des personnages, ce que nous sommes en train de faire.

Donc dans une première phase, avant le voyage, A... est très gentille avec Franck. Elle

s’intéresse à lui, écoute ses problèmes, le retient quand il veut partir. On peut analyser sa relation

avec lui par ses gestes, eux-aussi, marquent une certaine proximité. Elle s’approche de Franck,

quand elle lui tend la verre : « […] le plus possible […] elle s’appuie de l’autre main au bras du

fauteuil et se penche vers lui, si près que leurs têtes sont l’une contre l’autre. »92

C’était aussi

elle, qui a disposé des fauteuils de telle façon, qu’elle ait Franck à sa proximité : « C’est elle-

même qui a disposé les fauteuils, ce soir […] Celui qu’elle a désigné à Franck et le sien se

trouvent côte à côte […] »93

Les fauteuil ont aussi un certain ordre fixe, A... est « […] à la droite

de Franck sur la terrasse pour le café ou l’apéritif, à sa gauche pendant les repas dans la salle à

manger. »94

Quand elle attend Franck, elle ne laisse pas enlever son couvert, quand il n’arrive

pas, mais le laisse sur la table, bien que le couvert de Christiane, qui n’est pas venu, soit enlevé

91 Ibid., p. 71 92 Ibid., p. 18 93 Ibid., p. 19 94 Ibid., p. 53

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tout de suite : « Elle donne l’ordre d’enlever tout de suite celui qui ne doit pas servir. »95

Quant

au Franck, le couvert « […] de celui-ci demeure dans son état primitif jusqu’à la fin du

repas. »96

Elle même essaie d’attraper un moindre bruit ressemblant à un moteur d’une voiture,

qui signaliserait l’arrivé de Franck. Elle veut donc avoir Franck près d’elle, quand il veut partir,

elle le retient : « Mais non, répond A... aussitôt, il n’est pas tard du tout. »97

, elle discute avec lui

sur des thèmes quotidiens et sur ses problèmes de la plantation et des camions. Ils parlent aussi

du livre, que Franck a donné à A... et qui semble intéresser les deux, de plus si un thème vient de

milieu, qu’ils connaissent bien, du milieu des plantations. L’histoire traite, d’après ce qu’on peut

en déduire, d’une femme et de son mari trompé. Souvent quand ils parlent, il semble qu’ils font

des allusions avec leur propre situation, ou au moins ils ont l’air de le faire (d’après le narrateur-

mari ?) et se regardent de manière significatif après certaines remarques : « Franck regarde A...,

qui regarde Franck. Elle lui adresse un sourire rapide […] »98

Le livre est un point d’une

certaine mutualité secrète, c’est un thème dont le mari est exclu, où ils se sentent reliés sans un

autre interrupteur. La communication avec Franck est donc vive, elle lui parle beaucoup plus

qu’à son mari.

Le comportement de A... après (peut-être) la ville, est changé. Juste après la ville, A...

supporte Franck, qui se sent gêné par l’explication des raisons de l’accident et de la nécessité de

rester en ville, il se sent un peu dérouté. Pas A..., qui justifie leur séjour avec une certitude

inébranlable « […] d’un ton insouciant, qui contraste avec celui de son compagnon. »99

, elle

n’est pas nerveuse, que son mari pourrait la soupçonner, elle parle avec une confidence, sans

hésitation. On pourrait dire que c’est une preuve, qu’elle est innocente, mais il faudrait qu’il n’y

soit pas ce comportement de Franck, qui fait l’impression juste de quelqu’un de coupable. Si

l’adultère s’est vraiment passé, A... serait vraiment une bonne actrice, qui sait cacher son

incertitude ou même qui ne la ressentit pas, qu’elle ne sent pas honte ou des remords envers son

mari. Elle ne voit pas un inconvénient dans un tel comportement. Elle donc aide à son

compagnon à s’expliquer et à disperser des soupçons, que cet incident pourrait susciter. C’est

une phase juste après la ville.

Un peu plus tard, ou on suppose, que c’est plus tard, elle n’est pas tellement attentive et

gentille avec Franck, elle lui provoque par des remarques à double sens. Quand Franck parle de

95 Ibid., p. 17 96 Ibid., p. 72 97 Ibid., p. 30 98 Ibid., p. 26 99 Ibid., p. 87

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nouveau des problèmes avec un camion, et ne tarde pas à énumérer tous les détails d’un moteur,

comme pour prouver, qu’il le comprend, elle fait une remarque : « Vous avez l’air très fort en

mécanique, aujourd’hui »100

, où Franck, complètement déconcerté, perd la parole, et quand il la

reprend, en expliquant qu’il commence à en avoir l’habitude, parce que tous les moteurs se

ressemblent101

, elle ajoute : « Très juste […] c’est comme les femmes. »102

, que Franck déjà

semble ne pas avoir entendu. Ces remarques ont un ton fort personnel et s’il n’y a pas d’autres

preuves évidentes de l’adultère, ce comportement porte des signes significatifs d’une relation qui

est en train de se dépérir. Si les autres signes ou détails peuvent être interprétés par plusieurs

manières, ce changement du comportement et ces remords cachés ou provocatrices

accompagnent très souvent l’effondrement d’une relation, et peuvent donc être une preuve

importante, qu’une affaire entre Franck et A... s’est vraiment passée.

Le mari

La relation avec son mari ne subit pas aucun changement, parce que le mari en fait

n’existe pas dans le texte, c’est un mari invisible, qui se fait percer seulement dans quelques

situations, c’est un ombre du mari. On le suppose agir dans quelques situations. Elle s’adresse à

lui indirectement quand il manque de la glace, et le boy, le serviteur, n’arrive pas : « Un de nous

ferait mieux d’y aller ».103

C’est une préoccupation de A..., de s’occuper de la glace et c’était

pour la première fois, qu’elle l’a oublié. Cela suscite un soupçon, qu’il s’agit d’un acte

prémédité. Elle s’adresse à lui donc dans une situation, où elle a besoin de quelque chose ou

quand elle veut peut-être parler à Franck en privé.

Il entre dans une discussion quand il pose une question sur la santé de Christiane. Franck

fait un mouvement vers A..., qui l’a apparemment demandé avant, comme il voudrait qu’elle le

dise, mais elle ne dit rien, même après la question répétée concernant la santé de l’enfant, elle

reste muette. Elle ne se donne pas un effort de reproduire la conversation, pour que son mari

comprenne, elle ne l’y introduit pas.

Elle n’est pas très loquace quant aux raisons de son séjour en ville, elle ne les explique

pas, ce que le mari-narrateur, souligne plusieurs fois. Seule fois, quand elle est bavarde avec lui,

est après son retour de la ville, quand elle mange avec quelqu’un, évidement avec son mari et

100 Ibid., p. 198 101 Ibid., p. 199 102 Ibid. 103 Ibid., p. 47

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elle lui demande des nouvelles da la plantation, elle veut savoir ce qui s’est passé pendant son

absence et après le temps qui « […] de son propre côté, s’est trouvé si bien rempli […] ».104

Quand elle est interrogée sur ses propres nouvelles, elle parle seulement des choses généralement

connues, de la construction de la poste, d’une piste en réparation mais rien de personnel. Elle

évite donc commenter le déroulement du voyage au niveau personnel entre lui et Franck, elle ne

mentionne pas son nom, les choses qui leurs ont arrivé à pendant le voyage.

La relation de A... envers son mari est aussi bien visible sur la disposition des fauteuils,

qu’on a déjà mentionné, les fauteuils de A... et de Franck une à côté de l’autre et la fauteuil de

mari à l’écart : « Les deux autres fauteuils sont placés de l’autre côté […] davantage encore vers

la droite, de manière à ne pas intercepter la vue entre les deux premiers et la balustrade de la

terrasse […] Cette disposition oblige les personnes qui s’y trouvent assises à de fortes rotations

de tête vers la gauche, si elles veulent apercevoir A... - surtout en ce qui concerne le quatrième

fauteuil, le plus éloigné. »105

Et on suppose, que c’est le troisième, qui est désigné au mari-

narrateur, parce que le quatrième est resté vide, c’est apparemment celui, qui a été désigné à

Christiane, qui n’est pas venue. On a l’impression que A… veut se débarrasser un peu de lui, elle

veut peut-être qu’il ne les voit pas bien, mais elle surtout place à son côté Franck et pas son mari,

qui devrait y avoir son place naturellement.

Les indigènes

Avec les indigènes, A... s’entend bien avec eux. Elle les défend même, quand Franck se

plaint de ses chauffeurs indigènes, qu’on ne peut pas leur donner accès à une nouvelle machine,

elle s’oppose à lui qu’ils sont quand même des bons chauffeurs. Avec les serviteurs indigènes,

elle se comprend bien, il paraît qu’ils l’obéissent sans problème, elle ne se fait pas entendre

seulement au cas où elle le veut, comme il semble dans une histoire avec la glace, qui n’est pas à

sa place, quand on veut servir des boissons. Elle n’a pas problème de leur donner des

ordres : « […] on entend la voix d’A..., […] puis de nouveau la voix nette et mesurée, qui donne

des ordres pour le repas du soir. »106

, qu’il paraît que les serviteurs fournissent, ce qui contraste

avec la situation de Christiane, qui a beaucoup des serviteurs et qui ne l’obéissent pas trop, qu’on

a déjà mentionné. Elle apprécie aussi la voix d’un garçon noir qui chante quelque chant indigène.

Ce qui est intéressant, c’est son attitude envers les relations plus proches avec les indigènes, dans

104 Ibid., p. 95 105 Ibid., pp. 19-20 106 Ibid., p. 16

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le livre, qu’ils lisent avec Franck, une héroïne « accorde ses faveurs » à un ou plusieurs

indigènes, Franck le trouve un peu bizarre, mais A... le trouve, sinon amusant, en tout cas, elle

n’est pas contre, « Eh bien, pourquoi pas ? »107

Ce qui est un peu choquant pour une femme

aisée, belle, désirée de la haute société, qu’elle paraît être.

4.2.4 La parole de A...

Concernant la parole de A..., elle n’est pas tellement stéréotypée comme la parole de

Franck, même si en générale, leurs conversations sont tout à fait stéréotypes. A... ne se présente

pas pourtant par un tel nombre des expressions coutumières, elle sait surprendre parfois (son

opinion sur les relations avec les indigènes). Une de ses exclamations coutumières, c’est la

salutation, le bonjour, puis elle s’exprime avec répétition sur la santé de Christiane, sur les

problèmes avec le camion, mais elle est plutôt celle, qui réagit, pas celle, qui entreprend une

conversation, donc on ne la prend pas tellement « responsable » de ce dont on parle. On la voit

une seul fois dans une conversation privée avec son mari, quand elle mange après le voyage en

ville. Elle est bavarde mais elle ne parle pas de soi, elle ne se prononce pas sur le thème de

l’hôtel et elle ne fait aucune remarque sur Franck lui-même. Elle n’a pas même précisé la nature

de ses achats, qu’elle allait faire en ville. A... utilise aussi des doubles sens, sa parole n’est pas

très nette. Elle provoque ainsi Franck, en faisant des remarques ironiques sur ses expériences en

mécanique. Et pendant le repas, elle ne raconte pas, comment le voyage s’est passé, seulement

quelques détails insignifiants. Sa parole est typique par un certain effort de cacher, transformer la

vérité ou ce qu’elle pense vraiment, ce trait, on ne le trouve pas chez Franck, et si oui, on est plus

ou moins sûr, ce qu’il pense vraiment, chez A..., la certitude nous manque.

4.2.5 Le mille-pattes

A... est affrontée dans une scène d’une scutigère, ce qui est un mille-pattes assez grand et

parfois venimeux. C’est une des peu vraies actions dans l’œuvre. Quelques caractéristiques

intéressantes sont attribuées à cette scène, donc on va l’analyser un peu. La scutigère est un des

deux animaux, qui apparaissent dans le roman, un autre, un lézard, a été de quelque façon

rapproché de A... par ses yeux. La scutigère l’est aussi, mais par aucun de ses traits physiques,

mais par le bruit, qu’elle produit en marchant. La scutigère « […] n’est pas une des plus grosses,

107 Ibid., p. 194

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elle est loin d’être la plus venimeuse […] »108

, elle « […] facile à identifier grâce au grand

développement des pattes, à la partie postérieure surtout. »109

La scutigère apparaît sur le mur,

juste en face de A..., au milieu du repas. Elle est « […] de taille moyenne (longue à peu près

comme le doigt) »110

A... reste immobile, en l’apercevant, « […] elle ne réussite pas à se

distraire de sa contemplation, ni à sourire de la plaisanterie concernant son aversion pour les

scutigères. »111

La plaisanterie a évidement été faite par son mari, parce que « Franck, qui n’a

rien dit, regarde A... de nouveau. » Et puis, il se lève avec une serviette à la main et s’approche

du mur112

. A..., muette et pétrifiée, n’est pas capable de détacher son regard d’une scutigère, tout

en restant immobile, son anxiété s’exprime par les mouvements de sa main, qui se « […] ferme

progressivement sur son couteau. »113

L’angoisse de A... est silencieuse, elle se traduit seulement

par ses gestes.

Cette scène est une des scènes qui se répètent dans l’œuvre, même par cette répétition,

nous commençons à la percevoir comme symbolique de certaine façon. Les explications de cette

bête dans l’œuvre la désignent comme un symbole érotique. Peut-être, mais on pourrait aussi

l’expliquer par notre propre façon, d’après une allusion, qu’il suscite en nous. La scutigère

évoque quelque chose de répugnant, mais en même temps fascinant, sa laideur même devient

attirant, par son évidence, dans la vie normale, on essaie d’éviter une laideur ou de la

transformer, mais cette laideur ne se laisse pas transformer, elle est naturelle. Pour nous, cette

répulsion veut dire aussi une fascination par quelque chose qui est interdit et qui nous répugnent

d’un côté, parce que c’est perçu comme mauvais, mais de l’autre côté, cela nous fascine quand

même par une force incontrôlable. Ces sentiments pourraient être attribués au mari, parce que

c’est lui, qui le décrit et qui reprend toujours ce thème (entre autres). Ce serait lui, que la

scutigère fascine et attire, de plus que nous sommes plus tard les témoins de son effort d’effacer

une tache que mille-pattes a laissé sur le mur. C’est comme s’il voudrait effacer la honte ou la

trace de l’adultère. La tache donc représente pour lui un stigmate, c’est aussi une preuve d’une

réaction rapide de Franck, qui a tué la scutigère sans hésitation et qui a ainsi devancé le mari.

108 Ibid., pp. 62-63 109 Ibid., p. 62 110 Ibid. 111 Ibid., p. 63 112 Ibid. 113 Ibid.

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4.2.6 A... comme un personnage-hypothèse

A... est un personnage le plus décrit dans l’œuvre, elle est au centre de vue et de l’intérêt

du narrateur. Nous pourrions en déduire qu’elle est le mieux décrite et le mieux connue et donc

qu’elle s’approche du personnage-définition.

Nous connaissons l’apparence de A... de manière que cela nous affirme qu’elle est

attractive. On a des attributs qui sont souvent liés à une belle femme, des longs cheveux brillants,

des yeux verts obliques, une taille mince. Mais aucun trait vraiment typique qui nous indiquerait

son individualité, sa beauté individuelle. Elle est belle pour le narrateur, dans une caractéristique

physique, il se limite à cette information-ci. De même pour les vêtements, nous avons une robe

attractive qui lui est attribuée, malgré de nombreux descriptions, on ne mentionne pas d’autres

vêtements, sauf la robe, qu’elle a mis pour le voyage en ville. Comparé avec Franck, les

descriptions de ses vêtements sont plus pauvres. Sa caractéristique physiques est donc inachevée,

c’est une silhouette qu’on voit, une femme belle et attirante, mais sans des traits concrets.

Est-ce que A... est caractérisée dans le texte ? Oui, avec sa salutation matinale, où elle est

définie comme une personne souriante, comme quelqu’un qui n’a pas de soucis. D’ailleurs, elle

ressemble par cette description à Franck, qui doit être loquace et affable. Elle paraît souriante et

agréable, mais cette (seule) caractéristique (qui s’approuve par sa répétition, comme celle de

Franck), est mise en cause par le narrateur qui doute de son sourire et qui n’est pas persuadé, que

ce sourire soit franc. Donc le mari-même, qui doit connaître sa femme le mieux, ébranle notre

confiance en cette information. La caractéristique principale perd ainsi sa force probante. Le

caractère de A..., malgré son rôle central dans le texte, n’est pas vraiment connu.

Les sentiments de A... ne sont pas aussi très visibles. Son mari essaie de les rattraper,

mais il n’est pas très réussi : « Elle lui adresse un sourire rapide […] Non, ces traits n’ont pas

bougé […] Le sourire fugitif ne devait être qu’un reflet de la lampe […] »114

. Ajoutons un des

moments rares, quand le mari essaie d’entrer dans la conversation, parce qu’il veut savoir, si sa

femme a mangé ou non et il n’y arrive pas à le découvrir115

, parce qu’il n’est pas capable

d’intercepter ses mouvements. Elle se bouge et se comporte de la façon presque invisible,

difficile à analyser et à rattraper.

114 Ibid., pp. 26-27 115 Ibid., p. 24

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A... parle beaucoup, en comparaison avec son mari, mais le caractère de sa parole est

moins clair. On a l’impression d’une dissimulation dans son cas. Elle sait cacher, elle sait

détourner l’attention, mais elle s’exprime rarement de la façon directe.

L’image de A..., malgré toutes les autres caractéristiques, nous reste un peu flou et

indistinct, elle a un corps, elle a des vêtements, elle parle, mais nous ne sommes pas sûrs, ce

qu’elle pense et sa construction de base est trop incertaine.

En tant que signifiant, il y en a des informations qui le forment, mais ce sont seulement

ces descriptions des vêtements, des cheveux, des yeux et peut-être de ses épaules, mais aucun

d’autres indications ne présente pas une information explicite, une description explicite, on la

voit seulement dans plusieurs situations, comme un actant, mais pas défini. Son signifié devrait

être son sens, son signification dans l’œuvre. A... est une femme séduisante, un mystère pour les

hommes, qui se perdent dans ses paroles ambigües, elle est jolie et désirée. On ne sait pas

découvrir son vrai signifié derrière cette masque, cette rôle, on ne le voit pas clairement, on n’est

pas justement sûr d’elle. Elle n’est pas donc déterminée de façon plus fixe, elle nous fuit. Pour

cette raison, elle nous paraît comme la plus « hypothétique » des trois personnages, qui peuvent

en fait être tous désignés comme des personnages-hypothèses, mais il y a quand même une

certaine différence entre eux.

4.3 Le narrateur - le mari

Le narrateur dans le roman est supposé d’être le mari de A..., d’après quelques réactions

explicites ou implicites, qu’on peut trouver dans le texte.

Le mari de A... n’est pas décrit dans le roman, il est celui, qui voit, celui, qui raconte

l’histoire, mais en même temps, il participe à l’histoire de la façon réduite. On n’a pas ses traits,

ni physiques, ni psychologiques, une seule manière par laquelle il est possible de le décrire un

peu, ce sont ces réactions ou les actions indirectes, qui sont une seule source de sa présence dans

le texte. Ses actions sont indirectes de la façon qu’ils sont rapportées par lui comme un narrateur,

il ne parle pas de ces actes directement, « j’ai fait quelque chose », mais de la manière

impersonnel, « la question a été posé, la plaisanterie a été faite » donc on n’a pas une personne

qui l’a fait, mais on le déduit seulement du contexte, combien de personnes il y en a dans une

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scène et qui parlait à qui, on utilise une méthode éliminatrice pour lui identifier. Si la parole

n’appartient à personne d’autre, elle appartient à lui.

Le mari s’exprime dans le texte par plusieurs façons, indirectes, mais pourtant visibles.

Le mari est celui qui décrit et qui nous donne des informations, il ne raconte pas vraiment

l’histoire.

4.3.1 Le mari se prononce dans le texte

Les échecs du narrateur

Même si le narrateur-mari est invisible physiquement dans le texte, et on manque aussi

son intérieur explicite, il est possible de le découvrir d’après certaines marques ou traces, qu’il

laisse dans le texte.

D’abord, ce qui est une des marques évidentes de sa présence dans le texte, ce sont ses

hésitations en tant que narrateur, quand il ne sait pas, ce que le personnage a fait ou n’a pas fait.

C’est surtout dans une scène, où Franck et A... mangent (et probablement le mari aussi). Il décrit

la façon, dont Franck mange avec un ton un peu critique et puis il essaie de décrire A..., ou son

procès de consommation. Mais là, il n’est pas sûr, si elle a vraiment mangé ou non. Ce fait, déjà

susceptible, pourrait quand même signifier seulement, que le narrateur n’est pas un narrateur

omniscient. Ce n’est pas rare dans une littérature moderne, que le narrateur ne prétend pas, qu’il

connaît tous ses personnages et toute l’histoire. Mais ce narrateur aussi réagit ou agit dans le

texte, donc il appartient dans l’histoire, si on peut le dire ainsi. Il doute et donc il demande pour

se rassurer, il intervient dans le texte : « Pour plus de sûreté encore, il suffit de lui demander si

elle ne trouve pas que le cuisinier sale trop la soupe. »116

Il ne se prononce pas comme un

personnage « je », il utilise la forme impersonnelle « il suffit ». Donc même s’il pose la question

en tant qu’un actant dans une scène, il le cache. Il se cache. Et en fait, la question, elle-aussi, est

indirecte, il ne demande pas A… directement, si elle a mangé la soupe ou plus discrètement, si

elle a, par exemple, aimé la soupe, mais il s’intéresse sur la saleté de la soupe et il reçoit une

réponse semblable, indirecte. A... lui répond par une phrase, qui ne lui donne aucune information

sur la consommation de la soupe, achevée ou non : « Mais non, répond-elle, il faut manger de sel

116 Ibid., p. 24

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pour ne pas transpirer. »117

Il est donc impossible de constater, de faire un jugement, sur cette

scène, de plus que le garçon enlève les assiettes. Le narrateur a donc failli à découvrir, ce qui

s’est passé sur la scène ou dans la situation, il ne l’a pas aperçu. La faillite, c’est une marque

d’un narrateur vivant, qui est seulement un homme et ne peut pas tout savoir. Donc on peut y

trouver un effort de faire la narration authentique, par une démystification du narrateur par cette

défaillance confessée.

De la même manière, le narrateur échoue dans une conversation, où Franck et A...

discutent sur le livre, que le mari ne connaît pas et il essaie de rattraper certains mots ou certaines

remarques. Ceux-ci d’ailleurs donnent l’impression des allusions à la relation entre A… et

Franck, ou pourraient le donner. Il ne rattrape pas l’exclamation que pousse Franck, quand il

observe A... au lieu d’observer le niveau d’alcool d’une boisson, qu’elle est en train de préparer

pour lui.118

Un même ton d’incertitude est présent dans des scènes, où il observe sa femme et il

devine ce qu’elle fait, si elle tient une lettre dans sa main119

, ou il observe ses traits, incertain,

s’ils ont bougé ou non, essayant d’en déduire ses réactions. Dans des autre scènes, il découvre

une inconscience des objets ou des personnes autour de lui, « Il murmure quelques mots : un

remerciement sans doute. »120

, par exemple.

Nous voyons donc le narrateur (le mari ?) dans des scènes, où il exprime sa présence d’un

être imparfait humain, passivement, par sa confession de son faillite en tant que narrateur, qui ne

sait pas ce que disent ou font ses personnages, et aussi activement, en essayant de corriger cette

faillite.

Le regard

Le regard, c’est un autre phénomène qui laisse découvrir le mari ou le narrateur dans le

roman. Le narrateur regarde et il raconte ce qu’il voit, c’est un des principes de cet œuvre,

décrire par la vue et pas par l’intermédiaire des allusions ou des métaphores. Mais comme on va

voir encore plus tard et ce qu’on a déjà remarqué, sa vue n’est pas tellement « innocente » et

« pure », il y en a des allusions et il y en a des métaphores. Mais revenons à ce regard, qui est

une des armes principales de notre narrateur. Il se trahit par sa localisation précise, « […] regard

117 Ibid., p. 24 118 Ibid., p. 45 119 Ibid., p. 14 120 Ibid., p. 18

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qui, venant du fond de la chambre […] »121

, « La seconde fenêtre […] montre le côté de la table

coiffeuse, la tranche du miroir, le profil gauche du visage […] »122

, par le sens de la vue, qui

dénonce, qu’il a une certaine position, et qu’elle change, parce que les vues ne sont pas les

mêmes. Ce regard donne une impression d’un œil de caméra, par sa focalisation et son

exactitude. Celui qui regarde, donc bouge, et il ne voit pas tout, comme on l’a déjà attesté. Et ce

« voyeur » bouge évidement pour quelque raison. Par exemple, dans une scène avec la glace, on

nous propose le chemin le plus simple pour se rendre au bureau. Mais le mari-narrateur devait

aller (peut-être) chercher un serviteur pour l’avertir de leurs apporter la glace. Au lieu de cela, il

entre dans l’office et il paraît qu’il observe A... et Franck. Il nous décrit sa vue par la fenêtre et

nous annonce ce qu’ils paraissent faire. Par cet intérêt personnel, qui se voit dans un caractère

conditionné de son mouvement et aussi dans des jugements parfois subjectifs, il se diffère de cet

œil de caméra, et encore par cette focalisation déjà mentionnée, où le choix de ce qu’on voit,

nous donne un peu l’image de celui, qui « tient la caméra » et pourquoi il regarde. Notre

narrateur évidement « tient la caméra » pour chercher et trouver sa femme ou pour examiner ses

choses. Il est donc intéressé, c’est un homme, qui « tient la caméra », et il a sa vue influencée par

sa passion. Ses descriptions, qui sont souvent géométriques comme on a déjà dit, nous rappellent

par cette exactitude aussi le manque du sentiment, par lequel les objets seraient liés avec le

narrateur. Il semble que le narrateur s’intéresse seulement à A..., c’est elle, qui peut faire les

choses « personnelles ». Quand il parle d’elle ou des choses, qui sont reliées avec elle, il utilise

le langage plus subjectif, même les métaphores. Il paraît qu’il a coupé les liens avec le monde et

que la seul chose, qui l’intéresse, c’est sa femme, les autres choses n’ont pas une vraie

signification pour lui.

La perception de vue est parfois complétée par la perception de l’oreille explicite. Ce sont

les phrases « La voix de A... remercie […] »123

, « La voix de Franck continue […] »124

qui

marquent spécialement cet état où le locuteur ne voit pas les personnes, ou ne les regarde pas,

mais il est présent et il les entend. Nous pourrions prendre ce fait comme une autre épreuve de la

présence physique du narrateur dans le récit.

121 Ibid., p. 11 122 Ibid., p. 66 123 Ibid., p. 52 124 Ibid., p. 20

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La parole du mari

Le narrateur-mari ne se laisse pas apercevoir seulement par ses fautes et par sa

localisation, mais aussi par sa parole, même si très rarement dans le texte. Elle est toujours

indirecte, comme on a déjà dit, le narrateur est un intermédiaire de sa propre parole : « […] il

suffit de demander si elle ne trouve pas que […] »125

, il se prive de sa propre parole. Une autre

fois, quand il intervient, il essaie de s’introduire dans une conversation par une question sur

Christiane « Le moment est venu de s’intéresser […] »126

, et puis par la question sur son enfant,

quand il n’obtient pas une réponse. Il faut dire, que le narrateur-mari n’est pas très réussi dans les

discussions, la premier fois, il n’obtient qu’une définition générale, la deuxième fois, il n’obtient

rien. Cette phrase illustre bien la stéréotypie des dialogues, où se répètent les mêmes thèmes et

les mêmes mots, et les mêmes questions aussi. « […] la conversation reprend, sur les sujets

familiers, avec les mêmes phrases. »127

Nous rencontrons le narrateur, ou le mari, se prononcer encore dans une conversation

avec A... seule, qui est revenue de la ville, et qui, loquace et affable, veut savoir des nouveautés

de la plantation. Le narrateur en relève une expression « ce qu’il y a « de neuf » »128

, examine

son ton et son animation, qui d’après son évaluation129

, ne prouvent aucun intérêt particulier. Le

narrateur encore utilise ce ton impersonnel : « Sur la plantation aussi, ce temps a été bien

employé […] »130

. Il lui pose la question, elle est « interrogée »131

, mais elle n’est pas tellement

loquace sur les détails de sa voyage, elle voudrait parler, mais pas parler d’elle-même, seulement

parler. Le narrateur-mari n’arrive pas donc à obtenir des informations qui l’intéresseraient, de

nouveau. La parole du narrateur est donc cachée, indirecte, il faut la dériver du texte par la

« manque » d’un actant dans les situations, qui montrent à un mari. Ses paroles ne sont pas donc

tellement importantes, c’est plutôt la vue et les descriptions multiples, et leur caractère, qui nous

donnent les informations.

125 Ibid., p. 24 126 Ibid., p. 54 127 Ibid., p. 59 128 Ibid., p. 94 129 Ibid. 130 Ibid., p. 95 131 Ibid.

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4.4 Le personnage du narrateur-mari comme un personnage-

hypothèse

Le personnage du narrateur, nous paraît par son manque des caractéristiques tout à fait

hypothétique. Mais regardons le problème de ce narrateur-personnage de plus près.

Est-ce que nous avons le nom du personnage ? Non, il n’y en a pas. Son corps ? On

pourrait dire que oui, mais seulement comme un ombre, comme une raison, pourquoi la vue se

déplace. Il bouge, il nous dit par où il bouge, mais nous n’avons aucune autre preuve de

l’existence de son corps, il n’est pas décrit, il n’est pas touché. Quand même on l’accompagne

pendant ses découvertes, où on voit les objets examinés par quelqu’un et ce devrait donc être ce

propriétaire des yeux qui voient. On voit son corps par lui, par les actes faits par lui, donc encore

par intermédiaire. Son corps donc existe, on le dérive du texte, mais on ne le sait pas

explicitement, il n’y a aucune remarque, que le mari existe. Son corps est donc un corps caché,

inachevé, hypothétique, qui n’a pas de nom.

Quant à la parole, elle y est présentée, mais encore par intermédiaire, sa propre parole est

transmise par lui-même vers le lecteur. Elle ne le définit pas que par des caractéristiques

implicites, de quoi il parle. Elle n’a pas d’extension pour devenir stéréotype ou pour le décrire

d’une façon personnelle. C’est donc une brève information qu’il y a quelqu’un qui parle et cette

information nous laisse deviner, comment il est. Quand même, par le manque des informations,

nous pouvons dire, que nous connaissons un peu le personnage, après une telle analyse, nous en

relevons quelques informations importantes.

Même si c’est un personnage, qui n’est pas explicitement constaté dans le texte, nous

arrivons à acquérir quelques donnés sur lui. Ce devrait donc être un mari d’une jolie A..., qui se

déplace dans leur maison et cherche des preuves de l’adultère de sa femme. Il n’est pas très

bavard, si on peut en croire à ces conversations sur la terrasse. Il est pourtant un peu critique

envers la littérature de sa femme, qu’il semble juger d’après les critères d’une critique littéraire.

Il est donc plus exigeant que sa femme et même que Franck, sur le champ littéraire, mais il n’est

pas tellement « loquace » comme Franck. Il ne paraît pas le type à divertir la société. Il n’est pas

aussi tellement actif comme Franck, qui tue la scutigère, il prononce seulement quelque

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remarque un peu maligne, sur le compte de la peur de sa femme. Donc, une reproche, qui a été

prononcée contre le mari du livre que Franck et A... lisaient, serait aussi bien ajusté à lui,

concernant cette remarque sur l’indifférence du mari. Il ne s’occupe pas tellement de A..., et il

est de plus moins communicatif que Franck. Mais tout de même, il est jaloux de sa femme, on le

voit sur sa vue, qui la cherche et qui l’observe, il s’intéresse à elle, mais de la manière cachée. Il

donc semble comme quelqu’un d’introverti, qui ne s’exprime pas beaucoup mais pourtant, il a

une vie interne intense, des passions, qui le poussent à agir et c’est aussi quelqu’un qui examine

la littérature avec soin et avec plus d’attention que A... ou Franck.

Donc, en fait, nous pourrions dire, que le narrateur-mari ne présente pas un tel secret, ou

on peut dire que par le manque des informations, on n’est pas affronté aux contradictions. De

peu des informations qu’on a reçues, on pourrait le décrire quand même par quelques traits

importants, ce qui n’est pas possible de dire sur A..., qui nous surprend malgré le nombre des

informations. Alors, même s’il est hypothétique, il ne l’est pas à tel point que sa femme.

5 La comparaison des personnages d’après la théorie de

Daniela Hodrová

Nous avons essayé d’analyser les informations que nous avions sur les personnages dans

le roman La Jalousie d’Alain Robbe-Grillet.

En évaluant ces informations, nous pouvons essayer d’en faire une conclusion.

Nous avons donc observé trois personnages ou deux personnages et un narrateur-personnage.

Nous voulions comparer le degré de caractère hypothétique de ces personnages, de les localiser

sur l’axe entre deux pôles, deux types, entre un personnage-hypothèse et un personnage-

définition.

Franck a été évalué comme proche du personnage-définition, parce que son signifié est

plus ou moins clair, il s’approche même de la conception du personnage stéréotypé, personnage-

définition, parce qu’il est tout à fait prévisible, on pense qu’on pourrait prédire son

comportement.

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A... est un personnage tout à fait différent, on ne sait pas dire en avance, ce qu’elle va

dire ou faire. Elle se comporte d’après sa propre logique, mais elle ne la montre pas, elle ne

montre pas ses démarches de pensée et ne laisse pas découvrir son intérieur en le cachant

derrière son sourire. A… n’est pas donc déterminée, elle n’achève pas une complexité à la fin du

roman.

Le narrateur-mari paraissait personnage-hypothèse tout à fait typique. Mais peu à peu, on

est arrivé à construire son portrait, même si fictif, mais logique, et plus ou moins cohérent. Par

ses réactions et par son existence particulière dans le récit, on a pu dégager quelques traits de lui.

Même si on ne l’a pas rencontré dans l’œuvre, on peut le reconstruire d’après les traces, qu’il y a

laissé. Il n’est pas donc tellement hypothétique comme A…, dont les traits principales sont

incertains et elle nous fuit. Au contraire, il est possible d’attribuer au mari-narrateur une place

fixe dans le récit, tandis que A… oscille entre une impression, qu’elle donne, et ses paroles et

actions, qui ne sont pas toujours reliés logiquement. A… est donc un personnage le plus

hypothétique à cause de l’incertitude sur son vrai caractère. Après, ce serait le narrateur qui est

sans doute le second personnage le plus hypothétique, même s’il n’existe pas physiquement dans

le roman, son caractère est plus clair que celui de A… . Et puis, c’est Franck, qui, même s’il

n’est pas décrit physiquement, il se défini tellement bien par son comportement qu’il ne laisse

aucun doute sur son caractère.

Nous avons donc arrivé à une conclusion un peu différente d’une prémisse qu’on a

introduite au débout. Les personnages dans le roman La Jalousie d’Alain Robbe-Grillet, tout en

étant privés de beaucoup de traits et de caractéristiques importantes, peuvent se construire et

s’individualiser par des manières tout à fait variées et imprévues.

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6 Conclusion

Dans ce travail nous avons essayé d'analyser les personnages dans le roman d'Alain

Robbe-Grillet. Nous avons donc d'abord introduit des caractéristiques des personnages que nous

avons jugé comme principales, ce qui étaient les caractéristiques physiques, les caractéristiques

des vêtements, de la parole et aussi du caractère et du nom des personnages. Ces caractéristiques,

nous les avons relevées chez chacun des personnages, s'il y en avait. Enfin, nous avons comparé

ces caractéristiques, leur présence ou l'absence dans le texte, avec la théorie des personnages de

Daniela Hodrová, sa division de la typologie des personnages aux personnages-hypothèses et

personnages-définitions et nous avons essayé de déterminer auquel type ce personnage

appartient.

Nous avons donc évalué les résultats de notre analyse et nous avons comparé les

personnages entre eux. Le résultat de cette comparaison nous montrent que le personnage qui

peut paraître tout à fait hypothétique ne l'est pas tellement et que ce personnage, plus

précisément le narrateur, est quand même possible à caractériser assez bien. Par contre, le

personnage le plus décrit et le plus observé dans le texte, celui de A…, nous fuit et on ne peut

pas le caractériser plus précisément. Franck, le dernier personnage du roman, s'approche même

au caractère du personnage-définition par ses caractéristiques stéréotypées, qui, même si

incomplets, sont tout de même sans une contradiction notable et nous donnent un ensemble

complexe.

Le roman de Robbe-Grillet n'est pas donc vraiment privé des personnages, de ses

sentiments et de leurs caractéristiques, il est au contraire très « humaniste », comme l'affirme

aussi son auteur. Il est très subjectif, personnel, et c'est pour cela que nous devons dégager des

informations du texte par nous-mêmes, en comprenant qu'il s'agit de la vision tout à fait

subjective, qui ne prononce pas des caractéristiques générales, parce que ce n'est pas naturel pour

sa vision interne. Il nous dit seulement ce qu'il sait. Le narrateur ne prétend pas être objectif,

parce qu'il n'a pas raison de le faire, il existe seulement, il ne raconte pas. C'est à nous de dégager

les caractères des personnages du texte et de nous construire et comprendre l'histoire présentée.

C'était d'ailleurs une intention de l'auteur.

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Bibliographie

Littérature primaire

Alain Robbe-Grillet : La jalousie, Paris, Les éditions de minuit, 1957, 218 p.

Littérature secondaire

Ansgar Nünning: Lexikon teorie literatury a kultury, Brno, Host, 2006, 912 p.

Forster, Edward Morgan: Aspekty románu, Bratislava, Tatran, 1971, 218 p.

Hodrová D. a kolektiv: ...na okraji chaosu... Poetika literárního díla 20. století, Praha,

Torst, 2001, 865 p.

Pechar Jiří: Francouzský „nový román“, 1.vyd., Praha, Československý spisovatel, 1968,

201 p.

Robbe-Grillet, Alain: Pour un nouveau roman, Paris, Gallimard, 183 p.

Stanzel, Franz K.: Teorie vyprávění, Praha, Odeon, 1988, 321 p.

Šklovskij, Viktor Borisovič: Teorie prózy, Praha, Akropolis, 2003, 287 p.

Todorov, Tzvetan: Poetika prózy, Praha, Triáda, 2000, 333 p.

Sites internet

Les impressions nouvelles : Alain Robbe-Grillet par lui-même, cité le 21 avril 2009

depuis http://www.lespierides.com/in/biographie.html

Les Éditions de Minuit, Auteurs : Alain Robbe-Grillet, consulté le 25 avril 2009 depuis

http://www.leseditionsdeminuit.eu/f/index.php?sp=livAut&auteur_id=1445


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