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Mise en page 1 - BIEF...Novel Asterios Polypde David Mazzucchelli estungrand succèsaux ÉtatsUnis...

Date post: 05-Feb-2021
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sommaire pp. 2-5 Projecteur : Rencontres des éditeurs et des libraires francophones à Beyrouth pp. 6-7 L’international en questions p. 9 Réunion des directeurs de droits à Francfort : stratégies, développements et défis dans l’édition digitale pp. 11-17 Regards sur les manifestations : Foires du livre de Pékin, de Belgrade, Gaudeamus à Bucarest, Istanbul pp. 18-19 Rencontres en sciences humaines et sociales à Porto Alegre p. 20 Succès français à l’international : la caissière polyglotte pp. 21-22 Le Billet de New York Échanges franco-américains : « from Bande dessinée to Graphic Novel » pp. 22-23 Agenda du BIEF p. 24 BIEF info Ce numéro de fin d’année de La Lettre rend compte des actions initiées et organisées par le BIEF au cours du dernier semestre, actions liées – ou non – à la tenue d’une manifestation internationale, telle qu’une foire ou un salon du livre. On y trouvera des éclairages aussi bien sur la participation à ces foires et salons, la profes- sionnalisation que l’on peut observer pour certaines, la présence de plus en plus importante d’éditeurs de l’Hexagone et le dynamisme, souvent souligné par les organisateurs, du stand français. On pourra lire aussi des comptes rendus détaillés des séminaires professionnels, nombreux en cette période du calendrier, témoignant d’un besoin international de rencontres entre les différents acteurs des échanges. Ces séminaires, qu’ils se tiennent à l’occasion de grands rendez-vous mondiaux ou de réunions thématiques dédiées sont plus que jamais le moment, et le lieu, d’approfondir des coopérations professionnelles – cessions de droits comme coéditions – qui permettent de maintenir le volume d’échanges, dans un contexte de crise et de bouleversement technologique. À Pékin, comme à Beyrouth, à Francfort, naturellement, à Belgrade comme à Porto Alegre, des éditeurs et des libraires français, de la francophonie, et étrangers ont abordé cette année, ensemble, les problématiques du numérique et rendu compte des pratiques en cours. Le pari selon lequel l’édition « papier » et l’édition numérique se complèteraient semble se tenir, sous réserve d’une attention et d’un examen très fins portés aux questions juridiques et financières – liées à ces nouvelles formes d’exploitation. C’est, en soi, une bonne nouvelle pour la dyna- mique de l’édition française à l’international. L’enquête menée auprès de nos adhérents à la fin du printemps – portant sur les types d’actions et les destinations qu’ils souhaiteraient voir inscrire au programme d’activité 2010 du BIEF – a obtenu plus de la moitié de réponses sur les 270 entreprises d’édition interrogées. C’est pour nous un signal fort de l’intérêt porté par la profession à sa présence à l’interna- tional. Ces réflexions sont aussi naturellement menées avec les ministères de la Culture et des Affaires étrangères, ainsi que le Centre national du livre qui nous apportent leur appui. Le programme du BIEF 2010 paraitra début janvier. Ses grandes lignes sont déjà présentées sur notre site www.bief.org. Au nom de toute l’équipe du BIEF, je vous adresse nos vœux les plus chaleureux pour l’année 2010. Je ne doute pas qu’elle vous apportera nombre de satisfactions pour votre présence à l’international. Je vous confirme, qu’a notre place, nous accompagnerons les efforts de la profession pour son développement hors de nos frontières. Jean-Guy Boin lettre La www.bief.org 80 numéro décembre 2009 – janvier 2010 Réflexions sans frontières Le graphic Novel Asterios Polyp de David Mazzucchelli est un grand succès aux États Unis
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  • sommairepp. 2-5Projecteur : Rencontres deséditeurs et des librairesfrancophones à Beyrouth

    pp. 6-7L’international en questions

    p. 9Réunion des directeurs dedroits à Francfort : stratégies,développements et défis dansl’édition digitale

    pp. 11-17Regards sur les manifestations :Foires du livre de Pékin, deBelgrade, Gaudeamus àBucarest, Istanbul

    pp. 18-19Rencontres en scienceshumaines et sociales à PortoAlegre

    p. 20Succès français à l’international :la caissière polyglotte

    pp. 21-22Le Billet de New YorkÉchanges franco-américains :« from Bande dessinée toGraphic Novel»

    pp. 22-23Agenda du BIEF

    p. 24BIEF info

    Ce numéro de fin d’année de La Lettre rend compte des actions initiées et organisées parle BIEF au cours du dernier semestre, actions liées – ou non – à la tenue d’une manifestationinternationale, telle qu’une foire ou un salon du livre.

    On y trouvera des éclairages aussi bien sur la participation à ces foires et salons, la profes-sionnalisation que l’on peut observer pour certaines, la présence de plus en plus importanted’éditeurs de l’Hexagone et le dynamisme, souvent souligné par les organisateurs, du standfrançais. On pourra lire aussi des comptes rendus détaillés des séminaires professionnels,nombreux en cette période du calendrier, témoignant d’un besoin international de rencontresentre les différents acteurs des échanges.

    Ces séminaires, qu’ils se tiennent à l’occasion de grands rendez-vous mondiaux ou de réunionsthématiques dédiées sont plus que jamais le moment, et le lieu, d’approfondir des coopérationsprofessionnelles – cessions de droits comme coéditions – qui permettent de maintenir levolume d’échanges, dans un contexte de crise et de bouleversement technologique.

    À Pékin, comme à Beyrouth, à Francfort, naturellement, à Belgrade comme à Porto Alegre,des éditeurs et des libraires français, de la francophonie, et étrangers ont abordé cette année,ensemble, les problématiques du numérique et rendu compte des pratiques en cours. Le pariselon lequel l’édition «papier » et l’édition numérique se complèteraient semble se tenir, sousréserve d’une attention et d’un examen très fins portés aux questions juridiques et financières– liées à ces nouvelles formes d’exploitation. C’est, en soi, une bonne nouvelle pour la dyna-mique de l’édition française à l’international.

    L’enquête menée auprès de nos adhérents à la fin du printemps – portant sur les typesd’actions et les destinations qu’ils souhaiteraient voir inscrire au programme d’activité 2010 duBIEF – a obtenu plus de la moitié de réponses sur les 270 entreprises d’édition interrogées.C’est pour nous un signal fort de l’intérêt porté par la profession à sa présence à l’interna-tional. Ces réflexions sont aussi naturellement menées avec les ministères de la Culture et desAffaires étrangères, ainsi que le Centre national du livre qui nous apportent leur appui. Leprogramme du BIEF 2010 paraitra début janvier. Ses grandes lignes sont déjà présentées surnotre site www.bief.org.

    Au nom de toute l’équipe du BIEF, je vous adresse nos vœux les plus chaleureux pourl’année 2010. Je ne doute pas qu’elle vous apportera nombre de satisfactions pour votreprésence à l’international. Je vous confirme, qu’a notre place, nous accompagnerons les effortsde la profession pour son développement hors de nos frontières.

    Jean-Guy Boin

    lettreLawww.bief.org

    80numéro

    décembre 2009 – janvier 2010

    Réflexionssans frontières

    Le graphicNovelAsteriosPolyp deDavidMazzucchelliest un grandsuccès auxÉtats Unis

  • Rencontres des éditeurs et librairesfrancophones à BEYROUTH22 - 24 OCTOBRE 2009

    Désignée capitale mondiale dulivre en 2009 par l’Unesco,Beyrouth a voulu faire de son Salondu livre le point d’orgue d’uneannée déjà riche en événementsculturels. Créée en 1992, lamanifestation avait connu cesdernières années des vicissitudes,du fait des événements politiques,mais elle a retrouvé tout son lustre,faisant de la capitale libanaise laplus grande librairie francophoneau monde.Auteurs, éditeurs, libraires sontainsi venus en nombre aux côtésdu public libanais pour célébrerle livre et les littératuresd’expression française et fairehonneur à la tradition francophiledu pays du Cèdre.C’est au cœur de cette efferves-cence que se sont déroulées troisjournées d’échanges entre profes-sionnels du livre, organisées parle BIEF, à la demande del’Organisation internationalede la Francophonie (OIF), enpartenariat avec l’Association deslibraires francophones (AILF).

    Le travail du tempsEn réunissant des libraires et éditeurs

    francophones venus de Bruxelles,Cotonou, Dubaï, Hong Kong ou Berlinavec des éditeurs libanais, québécois,camerounais ou français, ces rencontresont offert une illustration de cette« diversité culturelle » prônée par l’OIFet permis de retrouver « l’ambiance dela vraie francophonie entre le grandnord et l’habituel grand sud», commele soulignait à l’issue du programmeAgnès Adjaho, qui a dirigé pendantplus de 20 ans la librairie Notre-Dameà Cotonou. Pour avoir pris part à denombreuses réunions professionnelles,elle a pu dire de ces rencontres qu’ellesétaient comme « le résultat du travail dutemps, de l’avancée dans les réflexions,de l’émergence de nouveaux question-nements sur les métiers de libraire et

    d’éditeur et de la capacité à adapter lesmétiers du livre aux nouveaux défis,sans sacrifier le sens de l’engagement desnouveaux acteurs».

    Une manière aussi de rappeler, côtélibraires, le chemin parcouru depuis lepremier colloque des libraires franco-phones organisé déjà à Beyrouth enoctobre 2001 et qui avait préfiguré lanaissance de l’AILF, jusqu’à ces ren-contres 8 ans plus tard.

    Le programme de ces trois journéesavait pour objectif de continuer àconstruire et à renforcer les conditionsd’une solidarité entre acteurs franco-phones du livre. Il comprenait unejournée consacrée aux échanges dedroits entre éditeurs francophones,une autre élaborée en partenariat avecl’AILF, dédiée « aux nouveaux visagesde la librairie francophone », et enfinune troisième journée pour évoquer lespasserelles entre chacun des métiers.

    Comme le soulignait Alain Gründen introduction, « ce qui nous unit,c’est une conception de notre métierqui passe aussi par le sens de la soli-darité, dont le respect du droit d’auteurou la relation avec les libraires offrentdeux illustrations emblématiques ».Alain Gründ répondait ainsi à ImadHachem, directeur de la lecturepublique au sein du ministère de laCulture du Liban, qui rappelait « l’atta-chement de son pays à la cul-ture francophone et à ladiversité culturelle ». Solidairesdonc, mais dans une franco-phonie du livre multiple et dis-paratre, « constituant non pasun mais plusieurs marchésfrancophones », comme a tenuà le souligner Pierre Astier,venu à Beyrouth pour témoi-gner sur sa double expérienced’éditeur et d’agent d’auteurs etd’éditeurs francophones. « Leregard des éditeurs français surces marchés francophones a

    évolué, mais il reste encore beaucoupà faire. Il doit être ainsi possible demultiplier les cessions de droits dansl’espace francophone en distinguant,par exemple, une édition pourl’Europe, une autre au Proche-Orientune troisième pour l’Afrique. Cettemultiplication des cessions ne se feraitpas au détriment des éditeursfrançais », a-t-il affirmé, ce qu’aconfirmé Rana Idriss, qui dirige leséditions Dar El Adab au Liban.

    Éditeurs de la francophonie :une identité toujoursà conquérir

    Éditeurs et libraires présents ontaussi voulu saisir l’occasion de cesrencontres pour témoigner d’une expé-rience et insister sur l’importance desdifférents contextes dans ces échanges.Au Liban, où « le dynamisme du marchédu livre n’est sans doute pas sansrapport avec la politique du livre »,comme l’a rappelé Imad Hachem, mais« où l’édition et la librairie souffrentde nombreux problèmes, dont lesquestions relatives au respect du droitd’auteur et à la lutte contre le piratagene sont pas les moindres ». En Suisse,où l’absence de politique du livre et laproximité avec la France ne facilitentpas la tâche à un « éditeur atypique »,comme aime à se définir MarlysePietri-Bachmann, directrice des édi-tions Zoé, à qui il a fallu 17 ans « pour

    lettreLa2 •décembre 2009 - janvier 2010

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    Lancement de la Chartedu libraire francophonedans le cadre du Salondu livre de Beyrouth

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  • lettreLa 3décembre 2009 - janvier 2010 •

    parvenir à passer la frontière » et voirses livres diffusés en France. ÉlisabethDaldoul, qui a créé en 2004 la maisonElyzad à Tunis, a fait part de sonparcours pour imposer une maisond’édition de littérature dans un pays aulectorat francophone restreint et où l’onparle de best-seller quand un livre sevend à plus de… 700 exemplaires. AuCameroun encore, quand de l’avismême de François Nkémé, jeunepatron des éditions Ifrikya, créées en2007 autour d’un catalogue exclusive-ment littéraire, le livre se résume pour

    l’essentiel à sa seule dimension scolaire.Disparité des environnements fran-

    cophones qui trouvait encore dans lestémoignages des libraires de multiplesillustrations. Qu’il s’agisse des librairesexerçant dans les pays « traditionnel-lement francophones », au Maghreb,en Afrique ou en Haïti, ou de leursconfrères qui diffusent le livre françaisdans les pays non francophones, c’estpourtant « une même conception qu’ils’agit de défendre à l’intérieur de lafrancophonie, bien que la manièredont le métier de libraire se pratiquediffère d’un pays à l’autre », a tenu àrappeler en ouverture, Philippe Goffe,libraire à Waterloo, en Belgique.

    La journée consacrée à la librairie,quant à elle, a voulu mettre à l’honneurles nouveaux visages de cette librairiefrancophone. Pour Agnès Debiage,

    libraire au Caire, qui se souvient del’opération organisée en 2000 « les 100libraires du monde », le paysage de lalibrairie francophone a depuis profon-dément changé. Aux librairies tradi-tionnelles, historiques, a succédé unenouvelle génération et de nouveauxprojets. Renata Sader, qui a fait le parien 2006 de monter une librairie « dansun désert culturel, car le livre ne faisaitpas partie de l’environnement deDubaï », a réussi en peu de temps àfaire de sa librairie «Culture and co »une vitrine de référence dans les paysdu Golfe. Autre nouveau visage, leForum à Fremantle, en Australie, unelibrairie créée en 2004 par JacquesBernard. « Dans un pays anglophonede 20 millions d’habitants, dans lequelon dénombre à peine 50 000 franco-phones, monter une librairie françaiseavait aussi valeur de pari fou. » Enouvrant par nécessité un site marchandpour pouvoir atteindre la clientèle sur

    Une chaîne du livrefrancophonepar-delà les océansPar Pierre AstierAvec environ 250 millions de locuteurs francophones, le français est lasixième langue la plus parlée dans le monde. Dans le domaine crucialdu livre, ce vaste bassin linguistique a besoin de plus de coopérations,de plus d’échanges, de plus de formations, à l’instar de ce qui se faitdepuis des années dans les bassins anglophone et hispanique. Desnombreuses initiatives qui ponctuent la vie du livre dans l’espacefrancophone, les rencontres de Beyrouth organisées par le BIEF etl’OIF, dans le cadre du Salon du livre francophone, auront eu le méritede confronter les points de vue de libraires et d’éditeurs venus deSuisse (Zoé), de Tunisie (Elyzad), du Maroc (Tarik), du Cameroun(Ifrikya), du Québec (Boréal), de France (Actes Sud) et du Liban(Dar El Adab et Tamyras), sous l’œil avisé d’Alain Gründ.La relation éditeur-libraire est depuis toujours essentielle dans lachaîne du livre. Mais la relation entre éditeurs et libraires franco-phones, étant donné la distance qui peut séparer les uns des autres,disséminés sur les cinq continents, n’est pas toujours aisée. Et sansdoute y eut-il là, à Beyrouth, de vrais signaux d’une forte envie decoopérer, d’échanger et de véritables découvertes mutuelles.

    La coopération nord-sud, nord-nord ou sud-sud entre éditeurs del’espace francophone était à l’ordre du jour. Circulation des livres,promotion, vente et échange de droits, coédition, numérique : lessujets abordés ont été nombreux et variés. Marlyse Pietri (Zoé) a toutd’abord exposé son rôle de diffuseur en Suisse de l’ensemble du cata-logue Harmonia Mundi et de son tropisme à l’égard des pays du Sud,puisqu’elle a autrefois diffusé en Europe les catalogues d’éditeursd’Afrique de l’Ouest, avant de présenter son propre catalogue. ÉlisabethDaldoul (Elyzad) a affiché son ambition de « conquérir », depuis Tunis,le marché francophone en général, français en particulier, en citantcomme exemple de percée significative le succès du dernier roman deLeïla Sebbar. Marie Desmeures (Actes Sud) a réaffirmé la politique de

    la maison arlésienne en matière de coéditions ou d’échanges dedroits en vantant la qualité de la coopération avec Barzakh (Algérie)ou Leméac (Canada). François Nkémé, l’un des fondateurs de la toutejeune maison d’édition camerounaise Ifrikya, a dit les multiples diffi-cultés rencontrées par un éditeur africain et l’importance, pour lui,que les éditeurs français acceptent de céder à des conditions abor-dables les droits d’exploitation de certains titres d’auteurs africains(ou autres) pour l’Afrique, abondant ainsi dans le sens des préoccu-pations et de l’action de l’Alliance des éditeurs indépendants. RaniaDriss, des éditions Dar El Adab, n’a pas dit autre chose, critiquant àmots voilés une persistante méfiance des éditeurs français à l’égarddes éditeurs du monde arabe. Pascal Assathiany (Boréal) a fait uneintervention très complète sur le numérique, en exposant clairementles enjeux sans les dramatiser. Pour conclure, Tani HadjithomasMehanna, de la maison d’édition libanaise Tamyras, a rappelé avecforce que la communication directe entre éditeurs et libraires étaitindispensable, y compris dans une même ville : Beyrouth ! Tous, parleurs propos, leurs échanges et leurs tempéraments, ainsi que parl’originalité de leurs catalogues, ont bien signifié à quel point lemétier d’éditeur est un métier de passion.

    L’annonce par CulturesFrance, pendant le Salon, de la création d’unprogramme de soutien de 200 000 euros aux éditeurs francophonesdu Sud, afin de leur permettre d’acquérir les droits d’auteurs de leur payspubliés en France, est venue conforter ces aspirations. Le sentimentpartagé par la plupart des participants était que les lignes bougent dansl’espace francophone, que le centre névralgique historique (Paris) estplus ouvert à la « périphérie ». Preuve en est : une semaine plus tard,le prix Femina étranger était décerné pour la première fois (celavalant pour l’ensemble des très parisiens grands prix d’automnefrançais) à un éditeur francophone, Zoé (Matthias Zschokke, Mauriceà la poule). Cette petite révolution venait après que plusieurs auteursfrancophones (Alain Mabanckou, Nancy Huston, Jonathan Littell,Leonora Miano, Yasmina Khadra, Tierno Monenembo, DanyLaferrière…) eurent reçu au fil des années précédentes l’un desgrands prix d’automne.

    La passion d’éditeurs confrontée à la passion de libraires : c’étaitlà le témoignage éclatant de la bonne santé de la bibliodiversitéfrancophone.

    Les libraires francophones :un métier à réinventersans cesse

  • lettreLa4 •décembre 2009 - janvier 2010

    tout le territoire australien, en réalisantaujourd’hui 90 % de son chiffre d’affairesen dehors de la librairie, Jacques Bernardsouligne la nécessité de réinventer lemétier. Une nécessité pour tous, ycompris dans cette francophonie duSud, comme l’a illustré l’intervention deRené Yédieti, le directeur du groupeivoirien «Librairie de France», pour qui« l’Afrique est bel et bien le futur marchédu livre pour la francophonie, ce quinous oblige aussi à mettre en placede nouvelles stratégies ». Comme entémoigne aussi à sa manière YacineRetnani, jeune repreneur de lamythique librairie «Carrefour du livre»à Casablanca, en cherchant de nouvellesclientèles.

    En définitive, pour tous les interve-nants présents, ce n’est pas seulementla question de l’avenir d’un marchéfrancophone qui inquiète. Selon AlainGründ, « la pratique de la langue esten déclin, mais nous restons une“langue de culture” et exerçons uneréelle influence qualitative ». RenataSader évoque de son côté « l’image“aspirationnelle” de la francophonieen tant que culture ». Et Patrick Suel,qui a créé en 2004 la librairie Zadig, àBerlin, affirme de son côté que la villequi abrite aujourd’hui près de 20 000Français « ouvre de nouvelles pers-pectives à la francophonie ».

    Les inquiétudes seraient ailleurs, ducôté de la crise économique, mais « sur-tout de l’incidence du livre numérique,qui oblige à repenser le modèle écono-mique» (Alain Gründ). Cette questiona été au centre de la troisième journéeavec le double témoignage de PascalAssathiany, directeur des éditions duBoréal (voir page 5) et de Marie-HélèneVaugeois, de l’Association des librairesquébécois. Nombreux à prendre laparole pour faire part de leurs interro-gations, de leurs doutes et de leursexpériences avec le numérique, édi-teurs et libraires du Nord comme duSud ont eu le sentiment de se retrouver« quasiment sur un pied d’égalité » faceà la question de l’avenir de leur pro-fession avec le livre numérique. Et decréer entre eux un réflexe de solida-rité… dans l’esprit de ces rencontres deBeyrouth. Pierre MyszkowskiOn peut consulter le programme détaillé de ces journées

    Frédéric Bouilleux

    • Jean-Guy Boin : Le rôle joué par le BIEF dans ces Rencontresde Beyrouth, à côté d’autres partenaires, correspond à samission de soutenir les échanges entre professionnels dulivre, notamment dans la Francophonie. Quels étaient lesobjectifs de l’OIF ?• Frédéric Bouilleux : Il a semblé utile à l’Organisation internationale de laFrancophonie de profiter de l’édition 2009 du Salon du livre francophone deBeyrouth – cette année « capitale mondiale du Livre » – pour réunir, autour desauteurs, l’ensemble des professionnels francophones de la chaîne du livre. Nousavions étrenné cette formule « fédératrice » l’an dernier lors du Salon du livre deQuébec, avec le concours efficace du BIEF et en partenariat avec l’Associationinternationale des libraires francophones (AILF), l’Alliance internationale deséditeurs indépendants (AIEI) et CulturesFrance. Le retour très favorable des parti-cipants nous confirme que les objectifs que nous nous étions fixés – décloisonnerles réseaux de professionnels, favoriser les échanges d’informations, confronterles expériences et provoquer les rencontres des auteurs, des professionnels et dupublic – ont été atteints.

    •J.-G. B. : Quelle était la spécificité de cette opération ?•F. B. : La rencontre a occasionné une meilleure écoute des points de vue réci-proques, les journées thématiques étant ouvertes à l’ensemble des professionnels.La journée «éditeurs», par la confrontation d’expérience diverses – provenant depays du Nord comme du Sud –, mais animées par le même désir de promouvoir larichesse et la diversité des expressions littéraires francophones, a permis derappeler les principales difficultés pour le développement d’un réseau d’éditeursindépendants : respect de la Convention de Florence et du Protocole de Nairobi,acquisitions des droits, diffusion…,mais aussi de dégager quelques pistes commeles coéditions solidaires Sud-Sud.Ensuite, lors de la journée « libraires», l’ensemble des difficultés que connaît la pro-fession a été abordé, en rappelant la nécessité de parer à l’établissement de mono-poles de distribution qui mettraient en péril les établissements de proximité.À l’issue de cette rencontre, une «Charte du libraire francophone» a été présentéeau public, qui rend hommage à ces passeurs méritants que sont les libraires etdéfinit les orientations déontologiques qui doivent guider leurs actions.Enfin, la matinée d’échanges entre professionnels des deux métiers a mis enévidence, par-delà les clivages traditionnels, la nécessaire mobilisation de tous pardes actions concertées pour affronter les défis de la mondialisation des échanges etde l’évolution rapide des nouvelles technologies : encadrement du développementd’Internet, lutte contre le piratage, droits d’auteur, qui affectent l’ensemble des pro-fessions de la chaîne du livre.

    •J.-G. B. : Quel rythme envisager, à votre avis, pour des rencontres« fédératrices» sur ce modèle?•F. B. : Le succès de cette rencontre – et, auparavant, de celle de Québec – nousincite à reconduire l’initiative, tant il est vrai qu’il reste beaucoup à faire pourredonner confiance aux différents acteurs francophones de la chaîne du livre, quimanquent trop souvent d’occasions pour sortir de leur isolement et accéder à desinformations concrètes. Ces rencontres régulières, qui pourraient être annuelles,devraient permettre d’établir un véritable plan de travail prévoyant des mesuresd’aides ciblées : sessions de formation, aide aux réseaux de professionnels, finance-ment par le biais de fonds de garantie pour les industries culturelles…La Francophonie souhaite poursuivre ainsi les objectifs qu’elle s’est fixés pourmettre en œuvre la Convention sur la diversité des expressions culturelles, en sou-tenant le développement des politiques culturelles publiques et en apportant sonaide à la constitution de véritables filières d’industries culturelles dans les pays duSud, notamment celle du livre.

    Frédéric Bouilleux est directeur de la languefrançaise et de la diversité culturelle et linguis-tique de l’OIF (Organisation internationale dela Francophonie). Cet organisme a soutenu lesRencontres de Beyrouth.

    Q U E S T I O N S À…BEYR

    OUTH

  • lettreLa 5décembre 2009 - janvier 2010 •

    Point de vuePascal Assathiany,directeur des éditions duBoréal (Montréal)* :

    «Tout ça,c’était déjàhier »« Je voudrais exposer ici le point de vue d’un éditeur quiréfléchit sur la question du livre numérique et de son impactsur l’économie du livre depuis quelques mois. Bien entendu,moi aussi je suis un partisan du papier, je ne conçois d’ail-leurs pas un livre autrement mais, depuis quelque temps,j’observe comme une accélération de l’histoire, qui m’obligeà réaliser que si l’on ne prend pas certains virages, aussibien comme éditeur que comme libraire, cela peut êtrelourd de conséquences.L’édition connaît depuis quelque temps une triple crise. Unecrise de changement de génération, tout d’abord : il est évi-dent que les jeunes ont une nouvelle relation au livre, quipasse par l’ordinateur. Une crise économique ensuite, mêmesi l’édition et la librairie sont, selon les pays, relativementprotégés. Et, enfin, un changement technologique important,avec le développement toutes ces années des outils informa-tiques. Preuve en est : un site web pour un éditeur et bientôtpour un libraire est devenu incontournable. Des intermé-diaires comme Google ont plus, récemment, développé desservices dont s’emparent éditeurs et lecteurs, comme parexemple un service de feuilletage. Et, aujourd’hui, un éditeurcomme Boréal a sa page sur Facebook ou Twitter. Mais toutça, c’était déjà hier !

    Aujourd’hui, un éditeur est confronté à quelques certitudes etpas mal de questions. Parmi les certitudes : le livre numériqueva exister, il existe déjà ; le livre papier continuera d’exister ; ily aura toujours un auteur et un lecteur.La principale interrogation porte sur la manière dont le livrenumérique va se développer. Pour le moment, il s’agit d’unfichier que le lecteur reçoit sur son ordinateur, sur son readerou sur son téléphone portable, ce qui lui permet de consulter

    tout ou une partie d’un livre. Au-delà, comment cela va-t-ilfonctionner, à quel prix, quels seront les intermédiaires ? Toutle monde cherche… Deux exemples récents en témoignent :aux États-Unis, le dernier livre de Dan Brown a été proposéen édition numérique en même temps que l’édition papier.Résultat : 2 millions d’exemplaires papier vendus et…100 000 téléchargements, correspondant à un prix devente plus bas que le prix de l’édition papier. Quant aunouveau livre de Stephen King, l’éditeur annonce sa paru-tion d’abord en édition papier puis, dans un second temps,un mois plus tard, dans une version numérique au même prixque l’édition papier.

    Les acteurs du livre hésitent et sont loin d’être d’accord entreeux ou d’un pays à l’autre. En Allemagne, les éditeurs ontdécidé que le prix du livre numérique serait le même que pourle livre papier ; aux États-Unis, le prix varie entre 9,99$ et15$ ; en Chine, les éditeurs proposent de plus en plus leslivres dans un format numérique accessible à un prixmodique et, si le livre est largement téléchargé, ils se déci-dent alors à en faire une édition papier.

    Néanmoins, une autre certitude : les libraires à l’étrangerseront touchés de plein fouet ! Il est facile d’imaginer qu’unlecteur, s’il cherche un livre particulier et qu’il ne le trouvepas en librairie, sera de plus en plus tenté de le trouver enformat numérique. Pour des raisons d’accessibilité, puisqu’unlivre numérique règle le problème des délais, du transport,des frais de douane. Bien sûr, à l’arrivée, le livre n’est pasaussi beau…

    S’agissant du support, mon sentiment est que le e-book estdéjà dépassé. Ce qui va se développer, c’est plutôt le livrenumérique disponible sur son portable.Quel va être le réseau de diffusion de ce livre numérique ?De l’éditeur au lecteur directement ? Ou, à l’inverse, endéfendant un modèle plus traditionnel ? En France, on vou-drait s’inspirer du modèle de diffusion du livre papier pourorganiser la diffusion du livre numérique. Le libraire conti-nuerait alors de recevoir les commandes de fichiers numé-riques pour les transmettre ensuite à un diffuseur, lequelserait chargé de l’envoyer au lecteur, tout en adressant lafacture au libraire, puisque le fichier aura été acheté par lelecteur auprès du libraire. Techniquement, tout ça se passetrès simplement. Dans ce schéma, le libraire a son rôle àjouer. Aux États-Unis, on privilégie la vente directe.Quelle va être l’économie du livre numérique ? EnAllemagne, on accorde une remise au libraire de 15 %. AuQuébec, la chaîne Archambault demande 30 %. En France, laremise du libraire se situerait entre 15 et 30 %. Recettemoindre pour le libraire, mais investissements moindres…Une conclusion provisoire : le schéma économique du livre vachanger mais, si le libraire veut avoir sa place dans ceschéma, il lui faut être techniquement prêt, pour proposerune vitrine numérique aux lecteurs de son pays - développéepeut-être de façon collective? Et continuer aussi de s’imposercomme un réel conseiller. Cela est sans doute encore plusvrai pour le libraire à l’étranger. »

    Propos recueillis par Pierre Myszkowski

    * Pascal Assathiany était l’un des intervenants de la journée sur les échanges dedroits et les coopérations entre éditeurs francophones.

    La charte de l’AILF n’est pasun label décerné par une autorité,

    « elle constitue,pour les signataires,

    un engagement de qualitéet de professionnalisme. »

    Michel Choueiri, président de l’AILF

    On peut lire l’intégralité du texte sur www.ailf.org

  • lettreLa6 •décembre 2009 - janvier 2010

    •BIEF : Dans le métier des droits étrangers, la question des droits numériquess’invite durablement dans tous les débats. Qu’en pensez-vous ?

    • Jean Mattern : Je suis un peu agacé par le battage médiatique autour de cette question. Lanégociation des droits électroniques, en matière d’achat comme de vente, se fait plus pressante et plusfréquente, disons depuis à peine un an. Mais il y a un contraste entre le discours sur le changement etles pratiques quotidiennes de nos métiers, qui n’ont pas évolué, ou du moins pas pour l’essentiel.D’autres sujets restent plus préoccupants, comme par exemple le sujet récurrent et non résolu de ladurée des droits de traduction.Pour moi, aujourd’hui les droits numériques sont un élément rajouté à un contrat d’achat ou decession de droits premiers, en général sous forme d’avenant. C’est un point de négociation.Il n’y a pas – ou peu – d’exploitation concrète, aucun support ne s’est imposé pour l’instant. Dansl’hypothèse d’une exploitation, on se réserve les droits, mais je ne vois pas que, dans le domaine dela fiction étrangère, ces produits numériques prennent une part de marché énorme.À titre personnel, je ne vois pas encore quelle serait la plus-value apportée dans ce secteur par rapportà l’édition papier et à tous les plaisirs de la lecture qui s’y rattachent ?De la même façon, aucun moyen technologique n’enlèvera le besoin pour nous d’être présent dansdes foires, qui nous servent « à recharger les batteries ». D’ailleurs, si elles avaient dû être remisesen question, c’est au moment de l’arrivée d’Internet.

    • Avez-vous ressenti l’impact de la crise sur votre activité ou dans les différentsmarchés qui la concernent ?

    • J. M. : Lors du dernier Francfort, les commentaires parlaient «d’une crise derrière nous ou de pasde crise du tout ». Ce qu’on peut constater sur les différents marchés étrangers avec lesquels ontravaille, ce sont de plus grandes difficultés dans les pays qui ne pratiquent pas le prix unique,comme les pays anglo-saxons et la Suède. Les marchés allemand, italien et français sont restés stables.L’Espagne a plus subi la crise, du fait que les maisons d’édition appartiennent à de grands groupesexerçant dans plusieurs types d’activité. De toute façon, l’impact de la crise d’un marché n’amoindritpas les chances d’un auteur ailleurs : ce serait l’un des bénéfices de l’internationalisation de l’édition.Une autre des raisons en est que les acheteurs de littérature étrangère dans certains pays sont plutôtmaintenant de petites maisons (comme les presses universitaires aux États-Unis, par exemple). Àl’intérieur de notre propre marché, les acquéreurs aussi ne sont plus les mêmes.Une particularité française dans le secteur des achats est la modération des à-valoir, qui ne corres-pond pas à une « collusion européenne », contrairement aux allégations d’un agent américainrelayées dans la presse. Une modération qui n’est d’ailleurs pas de mise dans des pays comme l’Italieou les Pays-Bas. C’est un facteur qui contribue lui aussi au dynamisme de notre marché.

    •Que retiendriez-vous, finalement, comme évolution majeure ?

    • J. M. : En littérature étrangère, nos principaux partenaires restent les pays anglo-saxons,l’Espagne, l’Italie, l’Allemagne, la Scandinavie, mais nous traduisons aussi des ouvrages de l’hébreu,du russe, des langues de l’Europe centrale et de l’Est. Et si Gallimard peut se vanter du grand succèsde l’ensemble des œuvres de Philip Roth à son catalogue, un auteur suivi par l’éditrice du domaineanglo-saxon, Christine Jordis, notre souci permanent est l’ouverture à toujours plus de langues,comme le hindi, le bengali, le javanais, l’islandais… ; nous traduisons déjà de plus de 35 langues.Une autre évolution à noter est qu’aujourd’hui presque tous les pays européens se sont dotés d’unsystème d’aides à la traduction des œuvres de leur pays, qui viennent renforcer l’aide des pouvoirspublics français – qui a toujours fait figure d’exception, particulièrement en ce qui concerne l’intra-duction, c’est-à-dire « la défense de la pluralité culturelle en France ».Le projet d’un fellowship au moment du Salon du livre de Paris 2010, organisé par le BIEF, meséduit beaucoup. Ce serait une ouverture de plus, une façon de « créer des têtes de pont » pourl’édition française à l’étranger.

    Propos recueillis par C. Fel

    Le premier roman de Jean Mattern, Les bains de Kiraly, publié par Sabine Wespieser,a été traduit en sept langues. Il est déjà paru en Roumanie et aux Pays-Baset va paraître en Allemagne, en Hongrie, en Grèce, en Croatie et en Serbie.

    Une satisfaction personnelle, à côté de celle – professionnelle – d’avoir acheté les droitsdu dernier roman d’Herta Müller avant son obtention du prix Nobel.

    Jean Matternresponsable des acquisitions chez Gallimard :

    Les évolutions – virtuelleset réelles – à l’international

    L ’ I N T E R N A T I O N A L E N Q U E S T I O N S

    « Notre souci permanentest l’ouverture à toujours

    plus de langues,nous traduisonsdéjà de plus

    de 35 différentes.»

  • lettreLa 7décembre 2009 - janvier 2010 •

    Les universitaires restent au centredes échanges internationaux commedu développement du numérique

    •BIEF : Vous vous déplacez souvent à l’étranger et revenez de la Foire de PortoAlegre, où vous avez participé au séminaire sciences humaines et sociales,organisé par le BIEF. Y a-t-il, d’après vous, de nouvelles particularités deséchanges à l’international dans ce secteur ?• Paul Garapon : On pourrait commencer par parler d’ouverture : les sciences humaines etsociales françaises sont décloisonnées, moins repliées sur elles-mêmes aujourd’hui que dans lesannées 70, considérées comme « l’âge d’or » de ces disciplines dans l’Hexagone. La vie intellec-tuelle s’est européanisée, puis mondialisée, en même temps que le marché en France se rétrécissait.L’essentiel des échanges intellectuels et académiques se fait avec les Allemands, les Anglais, lesAméricains, les Italiens, mais bien d’autres pays sont concernés. Cette effervescence de la vie uni-versitaire est le moteur de la vie éditoriale : nos projets d’achats se font très souvent avec lesdirecteurs de collection et même avec les traducteurs, qui sont en général des universitaires. Vientainsi de paraître aux PUF, en novembre 2009, dans la nouvelle collection «MétaphysiqueS », latraduction de l’ouvrage Métaphysiques cannibales du Brésilien Eduardo Viveiros de Castro, unefigure importante de l’anthropologie mondiale.De son côté, le Brésil reste tourné vers le marché européen, qui représente une alternative au face àface avec l’Amérique du Nord. C’est un marché constant. Ce qui m’a frappé lors des rencontres dePorto Alegre, c’est une forte envie d’éditer en rapport avec la grande vigueur de leur vie intel-lectuelle, une demande de savoir qui peut concerner des ouvrages difficiles, comme ceux de lacollection de philosophie « Epimethée », pour lesquels nous avons eu plusieurs demandes, lapsychanalyse ou les études marxiennes. On pourrait citer comme autres partenaires la Chine, leLiban pour le monde arabe, la Turquie, avec laquelle nous avons récemment fait une opérationspéciale autour des «Que sais-je ? ». Mais la liste serait longue puisque nous cédons nos ouvragesvers une trentaine de langues.

    • Moins de frontières entre les disciplines, entre les pays : le support numérique netrouve-t-il pas tout logiquement sa place et sa raison d’être en SHS, plus que dansd’autres secteurs ?•P. G. : Oui, et la mondialisation de l’accès a d’ailleurs commencé à se développer à partir desrevues. En effet, le format de l’article, format nucléaire pour les échanges et la pratique scientifique,se prêtait le mieux au numérique (côté production comme côté lecteurs). Une offre a donc été miseen place à partir du portail Cairn pour les nôtres – à la fois d’accès payant avec une barrière mobilede trois à cinq ans et de consultation gratuite de l’historique en deçà. Résultat : un très net regain deconsultation des revues, notamment à l’international, et de nouveaux abonnements au formatpapier. La raison de ce succès : la mondialisation n’empêche pas les bassins linguistiques d’exister.On peut donc parler à la fois d’un gain intellectuel très fort par une plus grande diffusion et d’ungain économique pour les revues. À travers cet exemple concret, on voit se dessiner un modèled’équilibre entre le patrimonial et le payant, accepté par la certification apportée par l’éditeur. Il enva autrement pour d’autres productions qui ne peuvent, en l’état actuel de l’outil « reader », en tirerun bénéfice vérifiable – c’est le cas des monographies de recherche, dont les ventes papier setassent ; mais il faut sans doute attendre la prochaine génération des readers et le modèle instru-mental que va bientôt proposer la marque Apple…Néanmoins, la mondialisation et l’émergence du numérique, c’est aussi le piratage – 87 000 destitres de notre fonds se trouvent référencés sur Google. Nos auteurs les plus piratés sont Deleuze etBergson, et on peut trouver jusqu’à certains de nos manuels à fortes ventes dans des recoins du net.Nous pouvons parfaitement chiffrer ce préjudice et les sommes sont importantes. Il faudrait sansdoute que les éditeurs de SHS s’organisent pour y apporter une riposte ferme et commune.

    •Les PUF préparent un dictionnaire couvrant l’histoire culturelle de la Francede 1848 à nos jours. Un livre pour l’international ?•P. G. : Il s’agit en effet d’un dictionnaire piloté par Jean-François Sirinelli et je ne doute pas que,comme la plupart de nos dictionnaires thématiques, celui-ci trouve à être traduit. On aurait tendance àpenser que, le dictionnaire étant gourmand en nombre de signes (un «petit» fait cinq millions), il estmoins acheté par nos confrères étrangers. C’est faux. Ces projets de traductions sont plus lents àmettre en place mais ils aboutissent. De là à dire que nous pensons nos projets pour l’international,non. Mais la grande quantité et variété des cessions montre que la production des SHS en languefrançaise est bien vivante, au contraire de ceux qui ont décrété une fois pour toutes la fin de ce marché.

    Propos recueillis par C. Fel

    Paul Garaponconseiller éditorial aux PUF en sciences humaines et sociales

    « Nos achats se fontsouvent avecles directeursde collectionet même avecles traducteurs

    qui sont en généraldes universitaires.»

  • la diffusion des savoirs. Antoine Gallimarden a donné une illustration en rappelantla récente labellisation des librairies dequalité (LIR), destinée à maintenir unréseau de librairies indépendantes et, parlà même, à soutenir la création éditoriale.

    «Ce ne sont pas les contenus qui fontla révolution, mais les distributeurs decontenus », a enchaîné le directeur derecherche au CNRS, Pierre-Jean Benghozy.Évolution ou révolution ? Renversementde perspective en tout cas, avec aujourd’hui« la diffusion qui précède la réglemen-tation », selon Denis Olivennes, cette« promptitude de la circulation » ayantdéjà été évoquée par Jean-Noël Jeanneney,qui a souligné aussi l’éclatement de l’inté-grité des œuvres sur Internet – « la fin de laculture de l’humanisme», selon l’éditeurAndré Versaille ? – et la menace que celafait peser sur le droit moral des auteurs.«Le ministère de la Culture doit protégerle créateur contre le fournisseur d’accès»,semblait conclure Nicolas Seydoux.

    Ce colloque voulait aussi croiser dif-férentes expériences européennes. Siaujourd’hui les 27 États de l’Union sontdotés d’un ministère de la Culture, dans lesannées 1980 les gouvernements européensaffichaient les mêmes objectifs mais avecdes moyens différents : répartition entrel’État et le territoire (Grande-Bretagne,pays nordiques, Pays-Bas) ; les systèmescentralisés (France, Grèce, Portugal) ; lefédéralisme, comme en Allemagne, enAutriche, en Belgique et en Espagne.

    Ce fut une tout autre histoire pour lespays de l’Est, « l’autre Europe», représentésentre autres par Ivaylo Znepolski, ancien

    ministre de la Culture en Bulgarie, qui asouhaité rappeler que la sortie de la « cul-ture dirigée» a été le moteur principal deschangements de politique en la matière.

    Est-ce donc à cause de ces situationsplurielles, de ce carrefour entre dirigisme,libéralisme, mécénat d’État, que l’Europe dela culture serait «un lieu chétif», comme l’aexprimé Elie Barnavi et que la politiquecommunautaire en matière culturelle estsouvent associée à un «saupoudrage»? Ici,la déception est grande : s’il y a une volontéforte des États membres d’en définir une,il n’en irait pas ainsi des instances euro-péennes concernées, même si l’on prend encompte la particularité du « temps euro-péen, qui n’est pas le temps national »,selon Christine Albanel, et même si l’on aretenu son soutien au label d’un patrimoineeuropéen et celui du ministre au projet debibliothèque numérique «Europeana».

    De différentes interventions, il estapparu pourtant que c’est pour la diversitéculturelle de l’Europe qu’il faut se battre,étant entendu que la culture de chaquepays qui la compose est déjà « unemosaïque en soi » et que la réception dela culture de l’autre ne peut aller sans lacertitude de la sienne propre. Mais c’estensemble que les pays européens peuventconstituer « a soul for Europe », selonVolker Hassemer : que les Berlinois soientfiers de Paris et les Parisiens fiers deBerlin. Est-ce une utopie ?

    D’autant de questions ne pouvait jaillirune certitude. Mais les contours d’uneaffirmation se sont dessinés au fur et àmesure : s’il faut visiter tous les jardins dumonde, il ne faut pas laisser cultiver sonjardin par les autres… Qu’en penseraientAmazon et Google ? Catherine Fel

    50e anniversaire du ministère de la Cultureet de la Communication : culture, politiqueet politique culturelle

    Ce colloque s’est déroulé les 13, 14 et 15 octobre 2009, au Théâtre national de l’Opéra-Comique, dans un contexteriche en événements autour du sujet de la culture, de sa place et de son rôle dans une société bousculée par lesnouvelles technologies. Tandis que la publication de l’enquête sur les pratiques culturelles des Français révélait unenouvelle culture de l’écran et une baisse de la lecture de livres, la polémique autour de la proposition par Google denumériser des fonds patrimoniaux des bibliothèques françaises habitait les colonnes des journaux.En écho à cette urgence de l’actualité, ces journées ont su faire entendre – à travers les nombreuses interventionsd’anciens ministres, de chercheurs, d’acteurs culturels, de créateurs – les questionnements liés aux différents bilansdu ministère, tout en réaffirmant sa volonté de ne pas rater le train de l’Europe ni celui du tournant du numérique.L’organisation de ces journées par le comité d’histoire du ministère, dont la présidence scientifique avait été confiéepour l’occasion à Elie Barnavi, a certainement largement contribué à cet « exercice de mémoire active», tel que l’adéfini l’actuel ministre de la Culture Frédéric Mitterrand, en ouverture de ce colloque. Le programme détaillé peutêtre consulté sur le site www.50ans.culture.fr. Nous ferons ici la synthèse de ce qui se rapportait à l’univers du livre.

    De l’idée fondatrice d’André Malrauxde faire accéder le plus grand nombrepossible à la culture, on en serait arrivé àl’idée de « la culture pour chacun». C’est-à-dire de la rencontre entre une offre et despublics et non plus seulement une dési-gnation et une transmission ex cathedrade l’idée du beau. Cette frontière entre laculture de l’excellence et le culturel est unvaste sujet qui a fourni la matière de laleçon inaugurale d’Antoine Compagnon,professeur au Collège de France, qui en amontré les articulations complexes.

    À l’idée de démocratisation se sontajoutées celles d’articulation et de régu-lation, comme missions du ministère.Maintenir l’«exception culturelle», la pro-téger contre les industries culturelles, touten admettant, avec Pierre-Michel Menger,directeur de recherche au CNRS, que, detout temps, « la littérature a évolué dans lasphère marchande» et, avec Jean-FrançoisChougnet, actuel directeur du musée d’artmoderne et contemporain de Lisbonne,que, « aujourd’hui, on peut défendre laculture par le rôle qu’elle veut jouer dansl’économie», n’est pas tâche aisée.

    L’adoption de la loi sur le prix uniquedu livre en 1981 et, aujourd’hui, de la loiHadopi 2, dans le cadre de la réflexion surle droit d’auteur et Internet, sont deux illus-trations de cette action de régulation dansla sphère du livre, avec les effets positifsdont sont venus témoigner plusieurs édi-teurs. Pour André Schiffrin, directeur deThe New Press, c’est bien aux États de jouerle rôle de contre-pouvoir vis-à-vis desmonopoles tout en assurant la diversité et

    Une politique européennede la culture à construire

    Comment concilier protection del’identité culturelle, multiplicationde l’offre et culture ouverte?

    lettreLa8 •décembre 2009 - janvier 2010

  • lettreLa 9décembre 2009 - janvier 2010 •

    Stratégies,développementset défis :comment rentabiliserles nouveaux produitsde l’édition digitale ?

    Le thème « Hitting a moving target –making money with digital content » attire :dans le milieu de l’édition, nous devonsbien nous sentir concernés par le sujet.Le modérateur de la conférence nous leconfirme, avec une pointe d’humour bri-tannique : la question, selon lui, n’est plusde savoir si oui ou non un éditeur souhaitegagner de l’argent en rendant sa produc-tion disponible en e-book, mais commenttrouver la meilleure stratégie pour engagner le plus possible.

    David Roth-Ey, direc-teur du développementnumérique chezHarperCollins UK et premierde sept intervenants,

    souligne qu’il faut avant tout cesser deconsidérer le livre numérique comme unemenace pour le livre traditionnel. Il énu-mère les questions que tout éditeur doit seposer quand il se lance dans le e-business :«Quelle est la stratégie appropriée pour mamaison d’édition et comment apprendre etprofiter des expériences qui ont été faitesdans d’autres secteurs (la musique parexemple) ? Quels droits numériques est-ce que je possède ? Mes responsables desdroits sont-ils capables de gérer ce nouveaubusiness? Quel est le prix approprié pourun e-book? Faut-il lancer le e-book enmême temps que le livre physique ?Comment protéger les contenus électro-niques ? Comment se défendre contre lepiratage ? Comment définir la notion deterritoire dans un système global de distri-bution? Quelles seraient les conséquencesd’un système de droits non exclusifs ?Vaut-il mieux fournir sous licence lescontenus à un éditeur spécialisé dans le

    Foire de Francfort, mardi 13octobre 2009. Le traditionnel« International Rights DirectorsMeeting» réunit 350 personnesau moins dans une grande sallede conférences de la Foire dulivre.

    livre électronique ou faut-il publier soi-même les contenus électroniques ? »Beaucoup de questions, en effet.Duncan Campbell, deWiley-Blackwell UK,un des plus grandséditeurs de livres uni-versitaires, académiqueset de STM, explique la stratégie appliquéepar son groupe. Il s’agit, bien entendu,d’une politique très spécifique, visant desmarchés précis comme les bibliothèques,les industries pharmaceutiques et médi-cales, les hôpitaux, les chercheurs, etc.Mais un terme revient dans les deuxprésentations, intraduisible, celui de« disintermediation » (suppression de lachaîne de vente). Le e-business nous obligeà repenser la chaîne du livre. Il y aura demoins en moins d’intermédiaires : unauteur pourra mettre son texte directe-ment à la disposition du lecteur, commeen musique. Récemment, le groupe RadioHead a mis ses chansons en accès direct,en download. Un défi pour tout éditeur.

    Troisième intervenant,Madeline McIntosh,d’Amazon Europe, pré-sente Kindle, le e-readerd’Amazon. Elle amuse

    l’auditoire en disant que l’évolution dusecteur est tellement rapide que les chiffresqu’elle a donnés il y a une semaine auxorganisateurs du séminaire ne sont déjàplus d’actualité. Elle fait ouvertement dela publicité pour son entreprise etannonce que si, le 9 février 2009, 250 000livres étaient disponibles sur le Kindle,le jour de la conférence, l’heureux pro-priétaire d’un Kindle pouvait lire 350 000ouvrages. Ensuite, Tom Turvey, directeurdes partenariats stratégiques chez Google,met lui aussi en avant la société pourlaquelle il travaille : il explique à quelpoint nous tous, éditeurs du mondeentier, avons de la chance de pouvoirenvisager un futur partenariat avecGoogle…

    Suivent les interventionsde deux petits éditeursallemands. ThomasSeng, de Tessloff Verlag,explique l’étonnante

    évolution de sa maison dans les 50dernières années. En adaptant son seulproduit, la collection WAS IST WAS, uneencyclopédie pour enfants, à toutes lesétapes du développement technologique,l’éditeur a fait preuve d’une étonnantecapacité de modernisation. En partantdu livre classique, en passant par lescassettes audio et vidéo, les jeux vidéosinteractifs, le CD-Rom et enfin le e-book,il a su attirer les enfants, toujours aptes àse servir des nouvelles technologies.Annette Beetz, de Gräfeund Unzer Verlag, unéditeur de livres illustrés,par le de contenusadaptés pour le télé-phone portable. Ce format très limité,mais accessible pour un lectorat quasiillimité, représente un potentiel énorme.Gräfe und Unzer a lancé un livre de cuisinepour i-phone. Des recettes sont ainsià tout moment – et surtout en tout lieu(un supermarché par exemple) – à ladisposition de l’utilisateur.

    Dernier intervenant,Zhou Hongli, directeurde Shanda Literature,en Chine, expliqueque les auteurs de ses

    e-books sont riches, car il les paie bien.Depuis plusieurs années, Shanda Literaturepossède une collection de e-books quirapporte de l’argent, tout en demandantdes sommes minimes aux lecteurs : enChine, c’est le nombre qui compte !Pendant les trois heures de cette rencontreinternationale, il est question de stratégies,de développements et de défis. Lorsqu’uneconsœur française, au cours d’une des trèsminutées séances de Q-A (question andanswer), pose deux questions qui semblentessentielles pour la compréhension de cesujet : «Comment fixer concrètement lesprix pour nos e-books et comment garantirà nos auteurs la protection de leurpropriété intellectuelle et de leurs droitsd’auteur dans ce contexte?», le modérateurconstate sèchement que ces questionsdépassent le cadre de la conférence. C’estdommage, car c’est précisément pourentendre des réponses à ces questions-làque la majorité des éditeurs était venue !

    Barbara Porpaczycessions de droits en non-fiction chez Stock

    photos©Foire de Francfort

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  • Échangesfranco-allemandsà la Foire du livrede Francfort

    Le programme Goldschmidt destiné auxjeunes traducteurs littéraires des deuxpays a été une nouvelle fois présentésous forme de lecture bilingue sur le standdu Centre de la traduction (Übersetzer-zentrum) et sur celui d’ARTE.Les titres retenus cette année étaientle roman Endmoränen de l’auteur est-allemande Monika Maron, Die Nachtdie Mauer fiel (La nuit où le mur esttombé), une anthologie sur la chute dumur, traduit aux éditions Inculte en 2009et, du côté français, le dernier roman deMatthieu Lindon,Mon cœur tout seulne suffit pas, paru chez POL en 2008.

    Sur le plateau, Doriane Bousquet, MarieHermann et Tatjana Kröll, toutes les troisparticipantes du programme 2009, l’auteurMonika Maron et Béatrice Angrand, lanouvelle secrétaire générale de l’OFAJ.Selon la tradition, les lectures se faisaientdans les deux langues, soit en alternance,soit sous forme des superpositions desvoix. Pour assurer la compréhension d’unpublic majoritairement allemand et pourrendre visible le travail des traducteurs,les textes originaux étaient projetés surécran. Pour la première fois, les lecturesétaient entrecoupées de courts entretiensavec les participants sur leurs expériencespendant le programme et sur les textesdont certains abordaient le sujet d’actualitéincontournable à Francfort cette année :le 20e anniversaire de la chute du mur deBerlin, auquel beaucoup de jeunesFrançais s’intéressent aujourd’hui.

    Pour les participants du programmeGoldschmidt, ces lectures à Francfortsont l’occasion de présenter leur travail àun grand public et de susciter l’intérêt deséditeurs pour publier leur traduction.«C'est très agréable de voir exister sontexte en direct devant un public et de sentirleur réaction. Cette lecture nous donneune immense visibilité dont on ressent lesbénéfices très rapidement : j'ai par exempleété interviewée immédiatement après par

    La Foire du livre de Francfort est une plate-forme idéale pour mettre un coupde projecteur sur les deux programmes franco-allemands que le BIEF organiseconjointement avec la Foire du livre de Francfort et le soutien de l’OFAJ.

    la Deutsche Welle» (une chaîne de radiointernationale comparable à RFI, ndlr),témoigne Marie Hermann.

    Pour les organisateurs, la Foire du livrede Francfort, c’est également l’occasion demettre en contact les jeunes traducteursavec les éditeurs et libraires français etallemands ayant participé à l’autre pro-gramme franco-allemand pour jeunesprofessionnels du livre. Pour faciliter cetterencontre interprofessionnelle, le BIEFréunit chaque année tous les anciens par-ticipants des deux programmes à sonstand. Un travail de réseau qui sera aucentre également des festivités lors desjubilés des deux programmes, qui aurontlieu l’année prochaine en France.

    Katja Petrovic

    10e éditiondes échangesfranco-allemandspour jeunestraducteurs littérairesProgrammeGoldschmidtParis – Berlin – ArlesDe janvier à mars 2010Ce programme permet chaque année à dix jeunestraducteurs littéraires français et allemands de ren-contrer des éditeurs en France et en Allemagne, puisde participer à des ateliers de traduction littéraire àBerlin et à Arles.

    Les échanges franco-allemandspour jeunes éditeurs et librairesfêtent leurs vingt ansFrance – Allemagne De mars à juin 2010

    Le BIEF et la Foire du livre de Francfort fêteront en2010 les 20 ans des échanges franco-allemands pourjeunes éditeurs et libraires. Le programme permetchaque année à vingt éditeurs et libraires français etallemands de suivre un stage dans une maison d’éditionou une librairie pour se familiariser avec le secteur dulivre de part et d’autre du Rhin.

    Les professionnelsfrançais etallemands veulentmieux s’entendre«Qu’est-ce qu’un Ladenhüter(littéralement « gardien de laboutique») et comment appelle-t-on son équivalent en français ?Un rossignol ». Autrement dit, un livre qui ne se vendpas en librairie. « Et un nègre…?»Pas facile de se comprendre entre professionnels dulivre étrangers, car le vocabulaire de l’édition est nonseulement, parfois, surprenant mais bien propre àchaque pays. Entre Français et Allemands, le dialoguedevrait bientôt s’améliorer grâce au glossaire desMétiers du livre français-allemand et allemand-françaisque l’Office franco-allemand pour la jeunesse (OFAJ)vient de publier. Le glossaire comprend plus de 600substantifs, verbes et adjectifs du secteur, couvranttoute la chaîne du livre, et de nombreuses informationssur la vie littéraire et le secteur dans chacun des pays.On peut se le procurer au format poche auprès del’OFAJ ou le consulter sur Internet : www.ofaj.org

    K. P.

    lettreLa10 •décembre 2009 - janvier 2010

    Le programme Georges-Arthur Goldschmidt faitdes émulesLe nouveau directeur du Collège international des traduc-teurs littéraires (CITL) à Arles, Jörn Cambreleng, s’est inspirédu programme Goldschmidt pour organiser un programmed’échange entre traducteurs français et turcs.Cette première édition d’un «master class » franco-turc sedéroulait dans le cadre de la saison de la Turquie en France.Trois traducteurs français et quatre traducteurs turcs, venusd’Istanbul, se sont réunis du 26 octobre au 8 novembrepour se familiariser avec l’édition des deux pays et travaillerensemble sur leurs textes, soit en en groupe soit en tandem,fidèle à la méthode qui jusqu’ici faisait la particularité duprogramme Goldschmidt. L’atelier de traduction était dirigépar des traducteurs expérimentés : Rosie Pinhas Delpuech ducôté français et Ismail Yerguz pour le côté turc. Parmi lestextes traduits pendant l’atelier, figurent Le psychanalyste deLeslie Kaplan, le roman Fehime de l’auteur Ayfer Tunç et Peradu poète turc Ilhan Berk. K. P.

    Le 9e Festival international de littérature de Berlins’est tenu cette année du 9 au 20 septembre 2009.Ce Festival est traditionnellement un rendez-vous très courudes écrivains du monde entier. Cette année, plus de 200auteurs de tous les continents se sont rassemblés dans lacapitale allemande. Le festival était plus spécifiquementdédié, en cette saison, à la littérature arabe.Une large part a été accordée aux auteurs français et fran-cophones : Philippe Djian, Emmanuelle Pagano, MarieDarrieusecq, Yvon Le Men, Mathias Énard, des écrivainsmembres de l’OULIPO, comme Le Tellier, Roubaud, Monk,Forte, Salon, Bénabou, des écrivains francophones exilésd’Irak, comme Atik Rahimi, Jabbar Yassin Hussein, l’AlgérienFrançois Zabbal ou Leïla Sebbar et Maïssa Bey ; ceux-ci ontabordé différentes questions autour de la littérature de l’exilou de l’image du monde arabe dans les pays occidentaux.

    C. F.

    BRÈVES

    Traduire et lire

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  • lettreLa 11décembre 2009 - janvier 2010 •

    SALON DU LIVRE DE

    BELGRADE26 OCTOBRE -1er NOVEMBRE 2009

    Une mer de livres(« ???? ????? »)

    C’est ce titre en forme de métaphore que lesorganisateurs avaient choisi pour la 54e édition de ce Salon deBelgrade, souhaitant que chaque lecteur y trouve un livre pour« l’emmener vers le large ».

    Pas moins de 150 000 visiteurs et quelque 800 exposants(dont 300 étrangers) ont honoré ce rendez-vous résolumentrégional, intéressant tant par sa taille que par la qualité despublications présentées, ouvert à la vente de livres – ce qui estpertinent, étant donné les difficultés de distribution dans le pays–, mais aussi aux débats et aux rencontres entre professionnels.

    C’est un événement national culturel significatif aussi bienqu’un événement régional important dans les Balkans. Il estainsi classé parmi les principaux salons du livre européens parles éditeurs internationaux.

    Publications de qualité, maquettes modernes, politiqued’auteurs sont autant d’attributs qui caractérisent l’éditionserbe, animée par une forte tradition bibliophile. Relativementpeu influencés par l’édition anglo-saxonne, les principauxéditeurs ne se cantonnent pas aux best-sellers mondiaux et sontsouvent la porte d’entrée de nombre de titres français pourd’autres pays des Balkans. Les ouvrages traduits, notamment dufrançais, constituent une part non négligeable des cataloguesdes grands éditeurs locaux qui s’intéressent à la littérature(Paideia, Geopoetika, IPS), comme aux sciences humaines(Clio) ou à la jeunesse (Beli Put, Zavod). Les éditions Beli Putavaient d’ailleurs fait de la traduction de Princesses oubliées ouinconnues (Rébecca Dautremer, éd. Gautier-Languereau) leurtitre phare pendant le salon.

    Une rencontre cibléeentre éditeurs serbes et français

    Au confluent de l’édition scolaire et de l’édition de loisirs, lespublications de vulgarisation scientifique et de documentairesconstituent une niche importante et bien définie pour leséditeurs. L’originalité de ces publications – par leurs formats,leurs graphismes ou leurs textes – pousse naturellement lejeune public à s’intéresser à ces sujets en dehors de l’école. Celadonne ainsi aux professionnels une marge de manœuvre nonnégligeable pour se détacher de la rigidité éditoriale desmanuels scolaires, tant dans le contenu que dans la forme.

    Afin d’en discuter, le BIEF et l’ambassade de France ontorganisé une table ronde réunissant Paola Grieco (éditions GulfStream, Nantes), Marianne Joly (éditions du Pommier, Paris),Ljiljana Marinkovic (éditions Kreativni Centar, Belgrade),Mirjana Jovanovic (éditions Zavod za udzbenike, Belgrade) etStevan Joki? (traducteur du français et physicien).

    Les méthodes de travail se sont révélées sensiblement simi-laires chez les Français et chez les Serbes, reposant sur un travailcollaboratif avec les enfants, ayant souvent recours aux illus-trations et aux ressorts humoristiques. Mais les deux éditricesserbes présentes ont fait part d’options de politique éditorialedifférentes. Les frais de création de ce type de publication étantrelativement élevés (rémunération de l’auteur et de l’illustrateur)et le marché serbe couvrant une petite surface linguistique, leséditions Zavod s’orientent essentiellement vers l’achat. À l’in-verse, les éditions Kreativni Centar (qui fêtent cette année leur20e anniversaire) cherchent à développer leurs propres créations,privilégiant ainsi une démarche spécifique à leur identité édi-toriale. D’un point de vue extérieur, ces divergences n’ont faitque confirmer le fait que le marché serbe est à la fois ouvert àl’international, via l’activité de traduction, tout en cherchant àse distinguer en développant des concepts sur mesure pour lelectorat national.

    Laurence Risson

    SALON DU LIVRE DE BELGRADEChiffres et repères

    Année de création : 1955Site : Convention Center de BelgradePériode de l’année : fin octobre (lundi-dimanche)Toutes thématiques, salon ouvert au publicNombre de visiteurs 2009 : environ 150 000Nombre d’exposants 2009 : 800Pays étrangers représentés en 2009 : Grèce, pays invité d’honneur 2009,Allemagne, Angola, Autriche, Brésil, Bulgarie, Bosnie-Herzégovine, Canada, Chine,Croatie, Espagne, France, Iran, Israël, Italie, Japon, Macédoine, Monténégro,Portugal, République serbe de Bosnie, Russie, Suède, Suisse.Sur ce salon, le BIEF est présent sur un stand européen réunissant l’Allemagne,l’Autriche, l’Espagne, la France, l’Italie et, depuis cette année, la Grèce.

    www.beogradskisajamknjiga.comInvité d’honneur 2010 : Suède

    De gauche àdroite :LjiljanaMarinkovic,PaolaGrieco,StevanJoki?,MarianneJoly, MirjanaJovanovi?

    © Jovan Popovic

    MANIFEST

    ATIO

    NSEN

    EUROPE

  • Brochureéditée

    par le BIEFà l’occasion

    desrencontres

    Le Pommier et Zavodsur la même longueurd’onde

    Le physicien Stevan Joki?, directeur scientifique de lʼInstitut Vin?a de Belgrade, a initié en Serbie, en 2001, le programme« Ruka u Testu ». Ce programme, « La main à la pâte » – créé en France en 1996 par Georges Charpak, Pierre Léna et YvesQuéré –, cherche à rénover lʼenseignement des sciences et de la technologie à lʼécole primaire, en favorisant un appren-tissage fondé sur la pratique et sur une démarche dʼinvestigation scientifique.Stevan Joki? a également traduit plusieurs ouvrages liés à ce programme: La main à la pâte, Graines de sciences 1, 2, 3, 4 et 5,ainsi qu’Enseigner les sciences à l’école, Découvrir le monde à l’école maternelle, La science institutrice, L’Ingénieur auchevet de la démocratie ; outre les modules pédagogiques comme L’Europe des découvertes, Le Climat, ma planète et moi…Ces ouvrages ont été publiés en France par le Pommier et en Serbie par les éditions Zavod, maisons participant toutes deuxà la rencontre entre professionnels des deux pays organisée par le BIEF et lʼambassade de France dans le cadre du Salondu livre de Belgrade.Rien dʼétonnant à ce rapprochement entredeux maisons affichant la même conceptionde ce type dʼouvrages de vulgarisation àdestination des jeunes. Pour Marianne Joly,éditrice jeunesse aux éditions du Pommier,le credo éditorial de la maison est de « rendrela science ludique et de rompre la barrièreentre le monde scientifique et celui deslecteurs ». De son côté, Sonja Maksimovi?,lʼéditrice de Zavod, souligne lʼexistence decollections pour initier les enfants aux phé-nomènes naturels dʼune manière amusante etéducative. « En plus des titres des auteurs denotre pays, nous traduisons des collectionsqui incluent, entre autres, des ouvrages devulgarisation scientifique. Notre politiqueéditoriale met lʼaccent sur la qualité, lacréativité et lʼinnovation ; ainsi, nos manuelssont réalisés dans un esprit éducatifmoderne et souvent accompagnés dematériel multimédia.

    Contact : Stevan Joki?Vinca Institute of Nuclear [email protected]

    Questions àLjiljana Marinkovic,directrice des éditionsKreativni Centar*BIEF : Comment définiriez-vous votre ligne éditoriale ?L. M. : Nous publions des livres illustrés, des livres ludiques, de lafiction pour enfants de tous âges, en restant fidèle à nos premiersobjectifs : développer la créativité enfantine, affirmer les méthodeséducatives contemporaines… Par le livre, nous incitons les enfantset les adultes à passer du temps ensemble. Nous tâchons que nosouvrages soient porteurs de l’esprit de tolérance, tout en déve-loppant la pensée critique chez les enfants. Nombreux sont nosouvrages qui ont ouvert les chemins à des nouvelles idées. À cet effetnous engageons, en plus de notre équipe, de nombreux expertsdans divers domaines : pédopsychiatres, pédagogues, instituteurs,linguistes, chercheurs.

    BIEF : Qu’attendez-vous des échanges professionnelsavec des éditeurs étrangers ?L. M. : Notre catalogue propose aujourd’hui 500 titres dont la moitiésont des livres traduits. Nos coopérations avec les plus grandesmaisons d’édition françaises (Gallimard, Larousse, Nathan, Bordas,Albin Michel, ....) a été un succès, et nous examinons la possibilité detravailler avec des maisons de plus petite taille. Notre principal butquand nous participons à des foires du livre est d’introduire unediversité culturelle dans nos livres illustrés et romans pour la jeunesse.Toutefois, nous essayons de publier le plus d’ouvrages possiblesd’auteurs et d’illustrateurs de notre pays. Á nos débuts, il n’y avaitpas beaucoup d’éditeurs de livres de jeunesse en Serbie. Aujourd’hui,ils sont beaucoup plus nombreux, mais rares sont ceux qui insistentsur la coopération avec les auteurs serbes.

    Propos recueillis par L. R.

    *Kreativni Centar a été primée comme la meilleure maison d’éditionserbe 2009 par les organisateurs du Salon du livre de Belgrade.Sa directrice, Ljiljana Marinkovic, était l’une des participantes des« cafés professionnels » du BIEF, organisés lors du dernier Salon dulivre de Paris, autour de quatre pays, dont la Serbie.

    BELG

    RADE

    lettreLa12 •décembre 2009 - janvier 2010

  • lettreLa 13décembre 2009 - janvier 2010 •

    28e FOIRE DU LIVRE

    D’ISTANBUL31 OCTOBRE - 8 NOVEMBRE 2009

    Échanges sur le BosphoreLe Bosphore est parcouru par des courants

    très forts au travers desquels des bateaux venusde tous horizons se croisent. Cette activitéfluviale intense peut être l’image stambouliotedes flux de traductions en matière de littérature.Ce fut le sujet du débat professionnel, organiséle 2 novembre dernier par le BIEF et Tuyap,qui gère la Foire internationale du livred’Istanbul. Elle réunissait cette année550 professionnels, dont 62 participantsvenus de 28 pays différents.

    Le débat mettait en présence Timur Muhidine, directeurde la collection «Lettres turques» chez Actes Sud, AhmetSoysal, philosophe et directeur du Plan d’aide à la publi-cation (PAP) de l’ambassade de France en Turquie, MehmetDermitas, directeur adjoint de l’agence littéraire Kalem,Cihan Akkartal, éditrice aux éditions Pupa, et Marc Parent,directeur du pôle Littérature étrangère chez Buchet-Chastel.

    Ensemble, ils ont abordé, devant un auditoire constituéexclusivement de professionnels turcs, les enjeux deséchanges de droits en matière de littérature : les effets perversou non des prix littéraires de renommée, qui offrent unfocus exclusif sur un seul auteur (prix Nobel, prixGoncourt, Booker Prize), la difficulté pour les éditeursturcs de trouver des traducteurs compétents, la nécessitéde définir la littérature d’un pays en la caractérisant par sescourants littéraires. Pour la France, Marc Parent estimait qu’ilne faut pas s’arrêter au Nouveau Roman ou à l’autofiction

    mais promouvoir aussi le roman narratif moderne qui saitrenouveler et prolonger la fiction française du XIXe siècle.Concernant la Turquie, il existe un clivage marqué entre unelittérature stambouliote, elle-même partagée entre différentscourants – trash, historique, poétique… –, et la littératuredite « de l’intérieur », ou anatolienne, qui reprend son essoravec des thèmes plus régionalistes. « Les écrivains classiquesqui ont le plus de notoriété sont Elif Safak (best-seller turc),Yasar Kemal et Nazim Hikmet. De la nouvelle générationémergent en France des auteurs comme Asli Erdogan ouPerihan Magden», précise Timur Muhidine.

    Le déséquilibre des cessionsQuand bien même la France est un des pays les plus

    ouverts aux acquisitions de fiction étrangère et ne se cantonnepas seulement à la suprématie anglo-saxonne, la littératureturque trouve difficilement sa place dans les catalogues etn’est que le miroir d’une infime partie de la production*. L’Étatturc, pour favoriser l’exportation de sa production éditoriale,a donc amorcé depuis deux ans le programme TEDA, qui aidelargement toute traduction d’œuvres turques en langueétrangère. Rappelons que, du côté français, le CNL proposedes aides pour favoriser l’intraduction. Ce souci d’ouverturevers l’international est sensible sur les lieux mêmes de lafoire, éloignée du centre d’Istanbul et qui réunit néanmoins lamajeure partie des acteurs du livre turc. Cet éloignementoffre la conséquence vertueuse d’imposer une présence mas-sive des éditeurs pendant les journées professionnelles, lesallers-retours multiples dans une journée étant impossibles.

    Les organisateurs de la foire font de nombreux efforts pourcréer des opportunités de rencontres : ils ont mis en place unfellowship d’auteurs et d’éditeurs de tous pays (Israël, Russie,Italie, Allemagne, Corée…) et créé des moments conviviaux oùéchanges de cartes de visite, manuscrits et catalogues sont demise. Cette initiative heureuse mérite d’être encore améliorée etsoutenue par les participants. Saluons d’ailleurs l’action del’Institut français d’Istanbul qui, dans le cadre de la manifes-tation, avait invité plusieurs auteurs et organiséun programme de lectures (Olivier Rolin, AlinaReyes, Marc Semo…).

    Le BIEF poursuit son approche du marchéturc en proposant, pour le prochain Salon du livrede Paris, deux journées professionnelles avec unevingtaine de professionnels turcs et la recon-duction de sa participation à la Foire interna-tionale du livre d’Istanbul, en novembre 2010.

    Sophie Bertrand* Dans l’étude «Le livre en Turquie : lieux et acteurs des relations éditoriales

    franco-turques », publiée par l’Institut français d’Istanbul en juin 2009,cette présence respective est détaillée.

    Carnet de plumes françaisesfranco-turc, une sélection horsdes sentiers battus

    Le thèmeprincipal de

    la foire était :la traductionau cœur des

    dialoguesentre lescultures.

    Traductionen turcd’Une nuitavecMarilynd’AlinaReyes

    Cette année, le catalogue collectif de la sectionLittérature est destiné au marché turc. Recensantplus d’une vingtaine de titres de littératurecontemporaine et présentant plus d’une quinzained’auteurs français, il a fait découvrir aux éditeursde fiction stambouliotes des romans et des écrivainsqu’ils ne connaissaient pas ou peu.Une diffusion restreinte à des professionnels pré-

    sents à la Foire du livre d’Istanbul a permis de percevoir leur intérêt etleur curiosité pour la fiction française.« Ce genre de catalogue est précieux : non seulement il est en versionturque – ce qui démontre l’intérêt des éditeurs français pour nous –, maiscette sélection collective d’ouvrages nous montre mieux la diversité de lafiction en France, hors des sentiers battus des best-sellers. Ça donne enviecomme une boîte de loukoums », a commenté de façon imagée KenanKocatürk, des éditions Literatür. S. B.

  • lettreLa14 •décembre 2009 - janvier 2010

    FOIRE DE L’ÉDUCATIONET DU LIVREGAUDEAMUS

    À BUCAREST25 - 29NOVEMBRE 2010

    Le livre reste un acteur prédominantde la vie culturelle roumaine aujourd’hui,en témoigne cette année encore la fortefréquentation de la Foire internationaledu livre Gaudeamus, où près de100 000 visiteurs ont déambulé dansles allées de RomExpo.

    Alors que la situation économique de la Roumanieconnaît une période difficile, quatre cents maisonsd’édition roumaine ont choisi de participer à l’événement.L’ambassade de France en Roumanie et le BIEF n’étaientpas en reste, puisqu’un stand abritant plus de 1 500 titresa été mis en place avec l’aide précieuse de la librairieCarturesti et de quelques étudiants francophones de laFaculté des Lettres de Bucarest.

    Cette année, le Service de Coopération et d’Actionculturelle (SCAC) de l’ambassade de France enRoumanie avait décidé d’organiser des tables rondestraitant de thèmes variés tels que «Le livre en crise » ouencore « Panorama de l’édition roumaine et françaisecontemporaine : que lire, qu’éditer ? ». Le but de cettedémarche étant bien évidemment d’aider les profession-nels français et roumains qui avaient fait le déplacementà mieux appréhender les marchés respectifs. C’est aussila première fois que des tables rondes concernant lajeunesse et la bande dessinée ont été organisées, susci-tant un questionnement autour d’un marché roumainqui peine à trouver son identité et un marché françaisparfois trop foisonnant.

    La France a toujours tenuune place primordiale dans laculture roumaine, la franco-phonie et la francophilie dulectorat roumain est un atoutconsidérable pour l’éditionfrançaise dans une Europe del’Est de plus en plus encline às’attacher à la littérature anglo-phone. Le SCAC et l’Institutculturel travaillent d’arrache-

    pied pour que cette situation perdure. C’est aussi grâce àdes professionnels roumains extrêmement motivés etparfaitement bilingues que ce marché du livre resteouvert à la culture française.

    Fanny Martin

    Le 28 novembre 2009, à l’occasion de la Foire internationale duLivre Gaudeamus, l’ambassade de France en Roumanie a rassembléauteurs et éditeurs autour d’une table ronde sur la littératurejeunesse : Anne Bouteloup, de Gallimard Jeunesse, Simona Rauta,de la maison Vellant, Igor Mocanu, des éditions Cartier, et AlinaDarian, de la maison Soarele si Luna, en tant que modérateur.

    « Pour évoquer la situation en Roumanie, Igor Mocanu des éditions Cartiera présenté leurs collections pour la jeunesse : « Cartier privilégie le genredocumentaire, même si pour l’instant il s’agit de traductions avec lesillustrations originales choisies par les éditeurs étrangers, comme parexemple les éditions La Martinière ». Simona Rauta a présenté sadémarche éditoriale, singulière sur le marché roumain : « En traduisantPrincesses, publié en France par Gautier-Languereau, Vellant a essayé dèsle début de soigner les images. Princesses est un livre cher pour le marchéroumain, mais ce fut un grand succès.»Alors que nous abordons le sujet de la création originale, Anne Bouteloupremarque qu’il y a une différence entre les petites maisons d’éditionfrançaises et roumaines. Des maisons d’édition comme le Rouergue ontdébuté en France avec des œuvres inédites, et non pas des œuvrestraduites. Pourtant en Roumanie en 2007 est apparue la première maisond’édition d’auteur. J’ai créé les éditions Soarele si Luna pour pouvoirpublier des histoires originales en format album. Le Prince du Royaumede Verre a été publié en 2007 avec des illustrations d’Irina Dobrescuet Le Dragon qui aimait le thé en 2008, avec des illustrations de MarianoEpelbaum.L’ouvrage a obtenu le succès auprès du public à la foire du livreGaudeamus 2007 puis auprès de la critique et de la presse roumaineslorsqu’il a été sélectionné par la Bibliothèque nationale de France pourreprésenter la Roumanie dans l’exposition « Le Tour d’Europe en 27 livresd’images » en octobre 2008. Ce qui prouve qu’une reconnaissance àl’étranger favorise le succès d’un livre ou d’un auteur roumain.En 2007-2008, le public a vu quelques parutions originales chez CorintJunior - Les aventures d’Arik par Ioana Nicolae ou, chez Nemi, Le jour oùle sommeil s’est enfui par Victoria Patrascu et L’histoire d’un grain de sablepar Ana Maria Lembrau. Chaque parution originale est un événementmais les livres n’ont pas assez de promotion pour attirer les lecteurs.À l’initiative de Florin Bican, écrivain et traducteur, et du Club desIllustrateurs, un recueil d’histoires pour la jeunesse illustré vient de paraîtreen Roumanie – « Bookataria » – comme le signal qu’une nouvelle générationde créateurs est née et essaye de renouer avec la tradition littéraire etartistique du livre de jeunesse d’avant 1989. Les contacts qui se créent àtravers les associations professionnelles et à travers les foires interna-tionales ont fait progresser ce domaine lors des trois dernières années.Ce sera finalement le jeune public lui-même qui sera la véritable force dechangement, car les enfants ont besoin de nouvelles histoires qui reflètentleurs rêves et leurs problèmes plus que ceux des générations passées.»

    Extrait de l’article paru dans le supplément à L’Observator Cultural(n°246, décembre 2009), réalisé avec l’appui de l’ambassade de France.

    Nous les remercions de nous avoir autorisés à le reproduire.

    Édition pour la jeunesseen Roumanie : une nouvellegénération de créateursest née Par Alina Darian, auteur et fondatrice de la maisond’édition Soarele si Luna (Le soleil et la lune)

  • ASIE

    FOIRE INTERNATIONALE DU LIVRE

    DE PÉKIN 3 - 7 SEPTEMBRE 2010Une cure de jeunesse

    Nul besoin de remède de la médecine traditionnelle chinoisepour dynamiser les échanges entre éditeurs de jeunessechinois et français ! Pour preuve, le séminaire professionnelorganisé par les services culturels de l’ambassade de Franceen Chine en collaboration avec le BIEF, qui inaugurait la16e édition de la Foire du livre de Pékin.

    Ces débats ont permis de réunir une vingtaine de professionnels,qui ont rappelé à grands traits les réalités et les caractéristiquesdes deux marchés et abordé le potentiel exponentiel des échangesen la matière.

    Depuis 2000, date de l’arrivée en version chinoise du magicienHarry Potter, la Chine a amorcé des évolutions dans l’appréhensiondes livres pour enfants. Mme Cao Min, directrice du département« Petite Enfance » des éditions Jieli, a montré d’une façon plusgénérale comment la pénétration de la production occidentale surle marché chinois avait modifié la perception des besoins et desdésirs du lectorat. En Chine, le livre pour enfant a d’abord essen-tiellement des vertus éducatives : il doit être le prolongement de lapédagogie utilisée dans le cadre scolaire. Par la diversité des illus-trations, la variété de la narration et des thèmes et les jeux destyles des ouvrages à l’occidental (les jeux de mots sont fréquents,le ressort de l’humour est souvent utilisé…), les éditeurs chinoisont pris en compte la notion de «plaisir ». Comme le précise MiaoWei, directeur de la section jeunesse de China Children Press etPublishing Group, on exploite aujourd’hui la veine de « la litté-rature jeunesse non utilitariste ».

    Autre phase de modernisation du marché en Chine : l’impor-tance de la stratégie marketing. Les prescripteurs sont les parentset la communication sur ces publications jeunesse est faite poureux. Xiao Liyuan, de China Peace Publishing House, précise quepour la sortie du Petit Nicolas en langue chinoise, ils ont demandé,pour faire connaître le personnage, qu’un spécialiste de la littéra-ture jeunesse écrive une série d’articles. On ne lésine pas sur lesmoyens. Pour le lancement de la version junior du «National

    CHIFFRES ET REPÈRES

    16e Foire internationale du livre de Pékin (BIBF)Superficie : 43 000 m2 d’expositionNombre de stands : 2 146, dont 1 762 de Chine continentale,les autres représentant 52 pays différentsFréquentation : 200 000 visiteursInvitée d’honneur : l’Espagne

    Stand FranceSuperficie du stand français : 90 m2Nombre de titres exposés : 800 titresNombre de maisons représentées : 40 maisons d’édition françaises

    Prochaines dates de la foire : 30 août - 3 septembre 2010Invité d’honneur : le Mexique

    Des éditrices chinoises en discussion avec l’agentdes éditions Auzou

    En bas à droite : Valérie Maris (Hemma éditions)

    Deux outils ont été publiés par le BIEF : un catalogue franco-chinois présentant une sélection de titres français disponibles

    pour une cession en langue chinoise et le premier Cahier del’éditeur jeunesse, proposant quelques articles synthétiques

    sur les marchés pour la jeunesse dans les deux pays.

    lettreLa 15décembre 2009 - janvier 2010 •

  • lettreLa16 •décembre 2009 - janvier 2010

    Geographic », l’éditeur n’a pas hésité à solliciter Barack Obama,lors de sa venue officielle à Pékin, pour qu’il assiste à la soirée delancement ! Le jeune lectorat potentiel (jusqu’à 14 ans) est estiméà 251 millions d’enfants. Capter leur attention et les fidéliser est lemeilleur moyen d’assurer la pérennité d’une collection.

    Dans ce contexte, les éditeurs chinois sont intéressés par lesproductions françaises : soit pour s’inspirer de certains conceptset l’adapter aux attentes locales, soit pour intégrer à leur cataloguedes albums aux univers variés et à l’illustration soignée. La qualitéapportée à la fabrication des livres crée une émulation chez leséditeurs chinois qui utilisent du papier de qualité et une impres-sion haut de gamme. C’est non seulement une question de valori-sation de leurs livres sur un marché très concurrentiel, mais c’estaussi le meilleur moyen de lutter contre la pratique du piratage,qui inonde le marché d’exemplaires de mauvaise qualité. Ladizaine d’éditeurs jeunesse présents (Ballon Media, Casterman,Dargaud, Auzou, Actes Sud, Rue du Monde, Sarbacane, Bayard,Hatier, Hemma) n’ont pas cessé d’avoir des rendez-vous sur l’espaceprofessionnel du BIEF. La qualité des échanges et leur fréquencefaisaient oublier le contexte de récession dans lequel se déroulaitcette édition de la Foire internationale du livre de Pékin. Cet évé-nement, au fil des ans, est une étape majeure pour les échanges dedroits de traduction. La délégation française, hors éditeurs jeunesse,a pu le constater. Univers Poche, Présence du Livre français,Dunod et Michelin (bien implanté en Chine) ont poursuivi leurtravail de prospection amorcé dès 2005, date des « années croiséesFrance-Chine ».

    L’an prochain, le BIEF, en lien avec les services culturels, propo-sera un séminaire pour les éditeurs de littérature. Ainsi, en quatreans, un cycle de tables rondes professionnelles thématiques auraété réalisé afin de favoriser les collaborations des éditeurs desdeux pays.

    Sophie BertrandJe remercie Zhang Yan, du bureau du livre de l’ambassade de France,

    des informations qu’elle m’a transmises pour la rédaction de cet article.

    «Depuis notre première participation à la Foire internationaledu livre de Pékin, nous avons beaucoup développé notre dépar-tement jeunesse ainsi que le département international, qui faitpartie intégrante du développement de la maison.Cette année, nous avions très bien préparé la foire en amont etnous comptions une soixantaine de rendez-vous. Respecter descréneaux horaires n’est pas vraiment chinois, mais l’engouementdes éditeurs chinois pour les livres jeunesse est impressionnant.Toutes les maisons d’édition souhaitent avoir un départementjeunesse. J’étais surprise de constater que même les éditionsuniversitaires ou technologiques – que je n’aurais pas pensé pros-pecter ! – s’intéressaient à nos livres : albums, livres éducatifs…Les éditeurs chinois m’ont paru plus intéressé par des formatsque par des types d’illustration. C’est à peine s’ils regardaientles grands albums – à quelques exceptions près –, trop chers àproduire. En revanche, la plupart des demandes se concentraientsur des collections de petit format carré. Il faut toutefois recon-naître que les illustrations trop élitistes, voire abstraites, ne leur“parlaient” pas. Après la foire, une quinzaine d’éditeurs ontvraiment prolongé l’intérêt qu’ils avaient manifesté à la foire.Aujourd’hui, je suis toujours en négociation sur plusieurs projets.Cela prend un peu de temps, car j’essaie de travailler encoédition ; et les éditeurs chinois ne sont pas habitués à ce genrede collaboration. Mais je suis assez confiante.La Foire de Pékin fut incontestablement un très bon cru. Exposersur le stand du BIEF fut également très positif, car il drainait unpublic important attiré par la notoriété du livre français. De plus,le séminaire franco-chinois sur le livre jeunesse organisé par leBIEF et l’ambassade avant la foire nous a particulièrement bienpréparés aux attentes des éditeurs chinois. Nous reviendrons en2010 à Pékin !»

    Aurélia Hardy(responsable des droits étrangers aux éditions Auzou)

    «Ce séminaire a permis de présenter de nouveaux produitsjeunesse mettant à l’honneur, notamment, de petits éditeurs :Alain Serres, directeur de Rue du Monde, Frédéric Lavabre,directeur de Sarbacane, et Johanna Brock-Lacassin, directricedes droits étrangers pour les éditions Actes Sud, Le Rouergue etThierry Magnier, avaient fait le déplacement. Il est encore tôt pourvraiment prendre la mesure des retombées de cette foire – et leséchanges avec les éditeurs chinois peuvent parfois être longs –,mais l’intérêt chinois pour les ouvrages français a été confirmé.Ainsi, Sarbacane a déjà signé un album avec Beijing Lighbookset le groupe Actes Sud est revenu avec trois nouveaux contrats,suite à son séjour à Pékin. Il ne reste plus qu’à suivre cesnouvelles collaborations qui tendent à fructifier.»Elsa Misson

    (services culturels de l’ambassade de France en Chine)

    Aurélia Hardy en rendez-vous sur la foire

    PE

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  • lettreLa 17décembre 2009 - janvier 2010 •

    Impressionschinoises : expérienced’une éditrice françaisedans une maisond’édition pékinoise


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